CHAPITRE XI.
DE LA SUBSTANCE DU PEUPLE DE DIEU, LAQUELLE SE TROUVE EN JÉSUS-CHRIST FAIT HOMME, SEUL CAPABLE DE DÉLIVRER SON AME DE L’ENFER.
Le Prophète adresse ensuite une prière à Dieu; mais sa prière même est une prophétie: «Jusques à quand , Seigneur, détournerez-vous jusqu’à la fin? » il faut sous-entendre votre face ou votre miséricorde. Par la fin, sont exprimés les derniers temps où cette nation même croira en Jésus-Christ. Mais, avant cela, il faut que tous les malheurs que le Prophète a déplorés arrivent. C’est pourquoi il ajoute : « Votre colère s’allumera comme un feu. Souvenez-vous quelle est ma substance ». Par cette substance, l’on ne peut rien concevoir de mieux que Jésus-Christ même, qui a tiré de ce peuple sa substance et sa nature humaine. «Car ce n’est pas en vain, dit-il, que vous avez créé tous les enfants des hommes ». En effet, sans ce fils de l’homme, sans cette substance d’Israël par qui sont sauvés plusieurs enfants des
hommes, ce serait en vain que les enfants des hommes auraient été créés, tandis que maintenant il est vrai que toute la nature humaine est tombée de la vérité dans la vanité par le péché du premier homme, d’où vient cette parole d’un autre psaume: « L’homme est devenu semblable à une chose vaine et chimérique; ses jours s’évanouissent comme l’ombre1; mais ce n’est pourtant pas en vain que Dieu a créé tous les enfants des hommes, puisqu’il en délivre plusieurs par le médiateur Jésus, et que les autres, qu’il a prévus ne devoir pas délivrer, il les a créés en vertu d’un dessein très-beau et très-juste, pour servir au bien des élus, et pour relever par l’opposition des deux cités l’éclat et la gloire de la céleste. Le Psalmiste ajoute : « Quel est cet homme qui vivra et ne mourra point; il délivrera son âme des mains de l’enfer2 ». Quel est-il, en effet, sinon cette substance d’Israël tirée de David, c’est-à-dire Jésus-Christ, dont l’Apôtre dit3 : « Une fois ressuscité des morts, il ne meurt plus, et la mort n’a plus d’empire sur lui ». Bien qu’il vive maintenant et qu’il ne soit plus sujet à la mort, il n’a pas laissé de mourir; mais il a délivré son âme de l’enfer, où il était descendu pour rompre les liens du péché qui en retenaient quelques-uns captifs. Or, il l’a délivrée par cette puissance dont il dit dans l’Evangile: « J’ai le pouvoir de quitter mon âme et j’ai le pouvoir de la reprendre4 ».
