CHAPITRE IX. MÉMOIRE DES SCIENCES.
16. Là, ne s’arrête pas l’immense capacité de ma mémoire. Elle porte en ses flancs tout ce que j’ai retenu de la science, et que l’oubli ne m’a pas encore dérobé. Et ces perceptions, je les garde à l’écart plus intérieurement, non pas en lieu, ni en images, mais en réalité, Car ce que je sais de la grammaire et de la dialectique, du nombre et de l’espèce des questions, n’est pas entré dans ma mémoire comme l’image, qui laisse la réalité à la porte, évanouie aussitôt qu’apparue; comme la voix imprimant à l’ouïe une trace qui la fait vibrer encore lorsqu’elle a cessé de raisonner; comme l’odeur qui, dans son passage, dissipée au vent, pénètre l’odorat et porte à mémoire d’une image qui se reproduit au désir de la réminiscence; comme l’aliment qui n’a plus de saveur qu’au palais de la mémoire; ou comme l’objet que la main a touché, dont l’éloignement n’efface pas l’empreinte : car les réalités de cet ordre ne sont pas présentées à la mémoire, (456) mais leurs seules images, qui, saisies avec une étonnante rapidité , sont rangées dans des cellules merveilleuses, d’où elles sont tirées merveilleusement par la main du souvenir.
