8.
Vous voyez clairement ce que je pensais alors de la foi et des oeuvres, quoique je fusse préoccupé de montrer toute l'importance de la grâce de Dieu. Cette opinion est partagée par ceux de nos frères dont vous me parlez; ce qui prouve qu'ils ont été plus désireux de lire mes livres que d'avancer avec moi dans l'étude d'un sujet aussi grave. Avec un peu de bonne volonté ils auraient trouvé la solution de cette question, d'après la vérité des saintes Ecritures, dans le premier de mes deux livres adressés à Simplicien, d'heureuse mémoire, évêque de Milan et successeur de saint Ambroise. J'avais composé ces livres dès le début de mon épiscopat. Il peut se faire, toutefois, qu'ils n'aient aucune connaissance de ces livres, et dans ce cas, je vous prierais de les leur adresser. Parlant du premier de ces deux ouvrages, dans le second livre des Rétractations, je disais : « Des livres que j'ai composés étant évêque , les deux premiers sont adressés à Simplicien, évêque de Milan, successeur du bienheureux Ambroise. Ils traitent de diverses questions, dont deux, tirées de l'épître de saint Paul aux Romains, occupent le premier livre. La première a été soulevée à propos de cette parole : Que dirons-nous donc? La loi est-elle péché? Nullement, jusqu'à celle-ci : Qui me délivrera du corps .de cette mort? La grâce de Dieu par Notre-Seigneur Jésus-Christ1. Dans a cette partie, les mots de l'Apôtre : La loi est spirituelle, et moi je suis charnel, etc.2 ; mots par lesquels il expose le conflit de la chair et de l'esprit, je les ai expliqués comme ne s'appliquant qu'à l'homme encore placé sous la loi et non sous la grâce. Bien longtemps après j'ai compris que ces mots peuvent s'appliquer, et avec plus de probabilité encore, à l'homme spirituel.
La seconde question de ce même livre a comprend depuis cette parole : « Non-seulement elle, mais aussi Rébecca, qui conçut en même temps deux fils d'Isaac notre père, a jusqu'à celle-ci : Si le Seigneur des armées ne nous avait réservé un rejeton , nous a fussions devenus comme Sodome et semblables à Gomorrhe3. Nous avons travaillé dans cette discussion pour le libre arbitre a de la volonté humaine. Mais la grâce de Dieu a vaincu, et nous n'avons pu arriver à rien autre qu'à reconnaître que l'Apôtre avait dit avec la plus éclatante vérité . Car qui te discerne ? Qu'as-tu que tu ne l'aies reçu? Or, si tu l'as reçu, pourquoi te glorifies-tu comme si tu ne l'avais pas reçu4? C'est ce que le martyr Cyprien voulait aussi démontrer, et ce qu'il a exprimé entièrement dans a ce titre de chapitre. Il ne faut nous glorifier de rien, car nous n'avons rien5 ».
Voilà pourquoi je disais précédemment que ma conviction s'était surtout formée sur ce passage de l'épître de saint Paul. Jusque-là je suivais un autre sentiment, mais dans mon ouvrage à Simplicien , au moment où je cherchais la solution, Dieu m'a révélé ce que je devais en croire. Ainsi donc, ce passage de l'Apôtre, si bien fait pour réprimer l'orgueil de l'homme : « Qu'avez-vous que vous ne l'ayez reçu? » ne permet à aucun fidèle de dire : J'ai la foi sans l'avoir reçue. Cette parole orgueilleuse est formellement contredite par la réponse de l'Apôtre. Il n'est même pas possible de dire : Quoique je n'aie pas la foi parfaite, j'en ai du moins le commencement, car c'est par là que j'ai d'abord cru en Jésus-Christ. Ecoutons cette réponse : « Qu'avez-vous que vous ne l'ayez reçu? Et si vous l'avez reçu, pourquoi vous en glorifier comme si vous ne l'aviez pas reçu6 ?
