8.
Nous disons en cinquième lieu dans cette oraison : « Pardonnez-nous nos offenses, comme nous pardonnons nous-mêmes à ceux qui nous ont offensés ». C'est la seule invocation où la persévérance n'est pas de. mandée. Car les péchés que nous prions Dieu de nous pardonner sont passés; tandis que la persévérance, par laquelle on obtient le salut éternel , est nécessaire à la vie présente, non point par rapport au temps déjà écoulé, mais seulement par rapport au temps qui doit s'écouler encore jusqu'à la fin de cette vie. Toutefois il n'est pas sans utilité de considérer un instant comment, à propos de cette demande, la parole de Cyprien, semblables un trait enflammé , frappait déjà mortellement les hérétiques qui devaient naître longtemps après lui. Les Pélagiens, en effet, portent la témérité jusqu'à dire que l'homme juste en cette vie n'a absolument aucun péché, et que les hommes de cette sorte forment dès le temps présent une Eglise qui n'a point de tache, ni de ride, ni rien de semblable1, et qui est la seule et unique épouse du Christ comme si l'Eglise, qui sur toute la surface de la terre redit ces paroles qu'elle a apprises de la bouche du Christ : « Pardonnez-nous nos offenses », n'était point son épouse. Mais remarquez comment le très-glorieux Cyprien porte à ces hérétiques un coup mortel. Expliquant ces mêmes paroles de l'Oraison dominicale, il dit entre autres choses : « Combien il est nécessaire, combien il est sage et salutaire de notes avertir que notes sommes pécheurs, en nous obligeant à demander pardon de nos péchés ! afin qu'au moment même où nous implorons la miséricorde divine, le souvenir de l'état de notre conscience soit présent à notre esprit. De peur que personne ne se complaise en soi-même en se croyant innocent, de peur que l'orgueil ne nous fasse périr sans ressource, « on nous avertit, on nous rappelle que nous péchons chaque jour, en nous ordonnant ode demander chaque jour pardon de nos péchés. Enfin, saint Jean déclare lui-même dans une de ses épîtres, que si nous disons a que nous n'avons pas de péché, nous nous trompons nous-mêmes; et la vérité n'est a point en nous2 » ; mais il serait trop long de citer ici le reste de ce passage.
