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C'est donc pour détruire cette opinion contraire à la reconnaissance que nous devons à Dieu et ennemie des bienfaits gratuits par lesquels il nous délivre, c'est pour cela que, suivant les Ecritures où nous avons déjà puisé beaucoup de preuves, nous établissons que le commencement de la foi et la persévérance jusqu'à la fin dans la foi, sont des dons de Dieu. Car si nous disons que le commence. ment de la foi vient de nous, et que, parce commencement, nous méritons de recevoir les autres dons de Dieu, les Pélagiens concluent de là que la grâce de Dieu nous est donnée par suite de nos mérites : doctrine qui répugne tellement à la foi catholique, que Pélage l'a condamnée pour n'être pas condamné lui-même. Pareillement, si nous disons que notre persévérance nous vient de nous-mêmes, et non pas du Seigneur, ils répondent que le commencement de la foi vient de nous-mêmes aussi bien que la fin, et voici comment ils raisonnent pour le prouver: Si nous pouvons par nous-mêmes persévérer jusqu'à la fin dans la foi, à plus forte raison nous pouvons par nous-mêmes aussi commencer à croire, car il est plus difficile de donner à une chose sa dernière perfection que de la commencer : voilà comment parfois ils prétendent établir que la grâce de Dieu est donnée suivant nos mérites. Si, au con. traire, l'un et l'autre sont des dons de Dieu, et si Dieu a su dans sa prescience qu'il donnerait un jour ces dons qui lui appartiennent (qui oserait affirmer qu'il ne l'a pas su?), on doit donc prêcher la prédestination, afin de pouvoir démontrer par des preuves inattaquables que la grâce de Dieu est une grâce véritable, c'est-à-dire qu'elle n'est pas donnée suivant nos mérites.
