17.
Si parfois, dans leur fuite, ils revenaient vers ceux qui les cherchaient, ils ne le faisaient pas témérairement; c’était sous l’inspiration de l’Esprit qu’ils venaient s’offrir à leurs ennemis, ces hommes religieux ! et ainsi montraient-ils leur obéissance et leur empressement. Tels furent Elie qui, fidèle à la voix de l’Esprit, se présenta devant Achab, Michée qui aborda le même tyran, le prophète qui apostropha l’autel de Samarie et confondit Jéroboam, Paul qui fit appel à César. Certes, ils ne fuyaient pas par peur, loin de moi cette pensée! leur fuite était plutôt un combat et une méditation sur la mort. Mais il était deux choses qu’ils observaient avec une admirable sagesse: ils ne se livraient pas inconsidérément; c’eût été se tuer soi-même, devenir responsable de sa mort et agir contre la volonté du Seigneur: Que l’homme, dit-il, ne sépare pas ce que Dieu a uni. Ils ne voulaient pas davantage encourir le reproche de pusillanimité et de faiblesse à la vue des afflictions de la fuite et de souffrances plus douloureuses et plus terribles que celles de la mort. Mourir, c’est se reposer de la peine; mais le fugitif, dans la perpétuelle attente de l’incursion des ennemis, trouve la mort plus légère qu’une telle vie. Aussi ceux qui périssent dans la fuite ne meurent-ils pas sans renom et jouissent-ils eux aussi de la gloire du martyre. Job est grand dans son courage, pour avoir, on vivant, supporté tant et de telles souffrances dont, s’il fût mort, il n’eût pas eu le moindre sentiment. Tel fut le principe de la conduite des bienheureux Pères : poursuivis, loin de s’effrayer, ils montraient leur intrépidité d’âme, s’enfermant dans d’étroits et obscurs refuges et s’y traitant avec dureté. L’heure de la mort arrivait-elle : ils ne songeaient pas à s’y soustraire. Ils n’avaient d’autre souci que de ne point trembler devant elle, de ne pas prévenir la décision arrêtée par la Providence, et de ne point aller contre l’économie pour laquelle ils se sentaient réservés; ils ne voulaient pas, par une précipitation téméraire, se jeter eux-mêmes dans l’affolement : car, dit l’Ecriture, L’homme prompt des lèvres, s’épouvantera lui-même
