Edition
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De corona militis
XI
[1] Etenim, ut ipsam causam coronae militaris aggrediar, puto prius conquirendum an in totum christianis militia conueniat. Quale est alioquin de accidentibus retractare, cum a praecedentibus culpa sit? Credimusne humanum sacramentum diuino superduci licere, et in alium dominum respondere post Christum, et eierare patrem ac matrem et omnem proximum, quos et lex honorari et post Deum diligi praecepit, quos et euangelium, solum Christum pluris faciens, sic quoque honorauit? [2] Licebit in gladio conuersari, Domino pronuntiante gladio periturum qui gladio fuerit usus? Et proelio operabitur filius pacis, cui nec litigare conueniet? Et uincula et carcerem et tormenta et supplicia administrabit, nec suarum ultor iniuriarum? [3] Iam et stationes aut aliis magis faciet quam Christo, aut et dominico die, quando nec Christo? Et excubabit pro templis quibus renuntiauit? Et cenabit illic, ubi apostolo non placet? Et quos interdiu exorcismis fugauit, noctibus defensabit, incumbens et requiescens super pilum quo perfossum est latus Christi? Vexillum quoque portabit aemulum Christi? Et signum postulabit a principe, qui iam a Deo accepit? Mortuus etiam tuba inquietabitur aeneatoris, qui excitari a tuba angeli expectat? Et cremabitur ex disciplina castrensi christianus, cui cremari non licuit, cui Christus merita ignis indulsit? [4] Quanta alibi inlicita circumspici possunt castrensium munium, transgressioni interpretanda! Ipsum de castris lucis in castra tenebrarum nomen deferre transgressionis est. Plane, si quos militia praeuentos fides posterior inuenit, alia condicio est, ut illorum quos Iohannes admittebat ad lauacrum, ut centurionum fidelissimorum quem Christus probat et quem Petrus catechizat, dum tamen, suscepta fide atque signata, aut deserendum statim sit, ut a multis actum, aut omnibus modis cauillandum, ne quid aduersus Deum committatur quae nec extra militiam permittuntur, aut nouissime perpetiendum pro Deo, quod aeque fides pagana condixit. [5] Nec enim delictorum impunitatem aut martyriorum immunitatem militia promittit. Nusquam christianus aliud est, unum euangelium et idem: Iesus negaturus omnem negatorem et confessurus omnem confessorem, et saluam facturus animam pro nomine eius amissam, perditurus autem de contrario aduersus nomen eius lucri habitam. Apud hunc tam miles est paganus fidelis quam paganus est miles fidelis. [6] Non admittit status fidei necessitates. Nulla est necessitas delinquendi, quibus una est necessitas non delinquendi. Nam et ad sacrificandum et directo negandum necessitate quis premitur tormentorum siue poenarum. Tamen nec illi necessitati disciplina coniuet, quia potior est necessitas timendae negationis et obeundi martyrii quam euadendae passionis et implendi officii. [7] Ceterum subuertit totam substantiam sacramenti causatio eiusmodi, ut etiam uoluntariis delictis fibulam laxet. Nam et uoluntas poterit necessitas contendi, habens scilicet unde cogatur uel ipsa. Haec praestruxerim et ad ceteras officialium coronarum causas, quibus familiarissima est aduocatio necessitatis, cum idcirco aut officia fugienda sunt ne delictis incidamus, aut martyria toleranda sunt ut officia rumpamus. De prima specie quaestionis, etiam militiae ipsius inlicitae, plura non faciam, ut secunda reddatur, ne, si omni ope expulero militiam, frustra iam de corona militari prouocarim. Puta denique licere militiam usque ad causam coronae.
Übersetzung
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De la couronne du soldat
XI.
En effet, pour commencer par la raison qui a introduit la couronne militaire, il faut examiner préalablement, j'imagine, si la milice est chose entièrement licite aux Chrétiens. Comment discourir d'ailleurs des accidents, si l'essence et le principe sont blâmables? Croyez-vous qu'il soit permis à un Chrétien d'ajouter au serment fait à Dieu le serment fait à un homme, et de s'engager à un autre maître quand il s'est engagé au Christ? d'abjurer père, mère, toute espèce de prochain que la loi recommande d'honorer et d'aimer après Dieu, que l'Evangile lui-même a honorés, en mettant au-dessus d'eux Jésus-Christ seulement? Lui sera-t-il permis de vivre l'épée à la main, quand le Seigneur a déclaré que « quiconque se servait de l'épée, périrait par l'épée? » Ira-t-il au combat le fils de la paix, auquel la dispute n'est même pas permise? Infligera-t-il à autrui les chaînes, la prison, les tortures et les supplices, lui qui ne sait pas venger ses propres injures? Entrera-t-il aux postes pour autre que pour Jésus-Christ et le jour du Seigneur, quand il ne le fait pas même pour le Christ? Veillera-t-il devant les temples auxquels il a renoncé? Soupera-t-il aux lieux qu'interdit l'Apôtre? Ceux-qu'il a mis en fuite le jour par ses exorcismes, les défendra-t-il la nuit, s'appuyant et se reposant sur la lance avec laquelle a été percé le côté de Jésus-Christ? Portera-t-il l'étendard rival du Christ? Demandera-t-il la livrée du prince, celui qui a déjà reçu celle de Dieu? Le mort qui attend la trompette de l'ange pour se réveiller sera-t-il troublé par la trompette qui réveille le soldat? Le Chrétien sera-t-il brûlé, d'après la discipline du camp, lui auquel il n'est pas permis de brûler, et à qui le Christ a remis la peine du feu? Combien d'autres actes dans le service militaire, qui ne peuvent être attribués qu'à la prévarication! N'est-ce pas déjà une prévarication que de s'enrôler du camp de la lumière dans le camp des ténèbres? |145
Toutefois, autre chose est de ceux que la foi est venue trouver plus tard sous le drapeau: ainsi de ceux que Jean admettait au baptême; ainsi des fidèles centurions que Jésus-Christ approuve et que Pierre catéchise, pourvu cependant qu'après avoir embrassé la foi, et s'être engagé à la foi, on quitte la milice, comme plusieurs l'ont pratiqué, ou du moins que l'on prenne garde de toute manière de commettre contre Dieu des choses que ne permet pas même le service militaire; ou enfin que l'on souffre jusqu'à l'extrémité pour Dieu: ce qu'ordonne également la foi païenne. Car la milice ne promet ni l'impunité des forfaits, ni l'immunité des martyres. Jamais le Chrétien n'est différent de lui-même. Il n'y a qu'un Evangile; il n'y a qu'un même Jésus-Christ, « qui méconnaîtra quiconque l'aura méconnu, et qui reconnaîtra tout confesseur de Dieu; qui sauvera l'aine perdue pour son nom, et qui, au contraire, perdra l'ame qui a voulu se sauver au détriment de son nom. » A ses yeux autant est son soldat le païen fidèle, qu'est païen son soldat infidèle. L'essence de la foi n'admet pas de nécessité. Il n'y a point de nécessité de pécher pour ceux qui ne connaissent qu'une nécessité, celle de ne pas pécher. Qu'un homme soit contraint, par la nécessité des tortures et des supplices, à sacrifier aux dieux et à renier directement sa foi, cependant la discipline n'est pas en connivence avec cette nécessité, parce que la nécessité de craindre l'apostasie et d'endurer le martyre, prévaut sur celle de décliner la souffrance et d'accomplir son devoir. Au demeurant, des prétextes de cette nature renversent toute la substance de notre serment, jusqu'à lâcher la bride aux prévarications volontaires. La volonté, en effet, va se convertir en nécessité, ayant toujours de quoi être contrainte. J'ai détruit par ces préliminaires toutes les raisons sur lesquelles reposent les couronnes qui se distribuent dans les charges publiques, et pour lesquelles on invoque d'ordinaire l'excuse et la nécessité, puisque dans cette circonstance il faut |146 abandonner ses offices pour ne pas tomber dans la prévarication, ou endurer le martyre, pour échapper aux filets de nos offices. La milice est-elle licite? Je ne discuterai pas plus long-temps cette première question, afin de résoudre la seconde, de peur que, repousser la milice par tous les efforts possibles, ce soit ensuite chose vaine que d'attaquer la couronne militaire. Ainsi la milice est permise, d'accord, mais jusqu'à la couronne exclusivement.