XLI. Les Sabelliens ou Patripassiens,
XLI. Noet, dont il vient d'être question, eut pour disciple Sabellius , maître des Sabelliens : ceux-ci furent donc une branche des Noétiens. Je ne sais, à vrai dire, pour quel motif Epiphane a fait des Noétiens et des Sabelliens deux sectes différentes, car il a pu arriver que Sabellius ait fait plus de bruit que Noet, et que cette hérésie ait conséquemment reçu de lui un nom plus célèbre. A peine connaît-on les Noétiens : pour les Sabelliens, beaucoup de personnes en savent le nom. En effet, les uns leur donnent le nom de Praxéaniens, de Praxéas ; les autres, celui d'Hermogéniens, qui vient d'Hermogène : ces deux personnages soutinrent la même doctrine, et vécurent l'un et l'autre en Afrique. Ce ne sont donc pas plusieurs sectes, mais ce sont des noms différents donnés à une seule et même secte, en mémoire des hommes les plus célèbres qui en firent partie. Ainsi en est-il des Donatistes et des Parménianistes, des Pélagiens et des Célestiens. Comment donc expliquer pourquoi Epiphane nous représente les Sabelliens et les Noétiens comme deux sectes bien distinctes, tandis qu'ils appartiennent à la même, sous diverses dénominations? Je ne le vois pas clairement : car, s'il existe entre eux une différence essentielle, il en a parlé d'une manière si obscure, peut-être parce qu'il cherchait à être concis, et qu'il m'est impossible. de saisir sa pensée. Mettant les Sabelliens au rang où ils se trouvent ici, mais si loin des Noétiens, il s'exprime en ces termes : « Les Sabelliens professent les mêmes erreurs que les Noétiens, avec cette différente pourtant que, selon eux, le Père n'a pas souffert1 ». Est-il possible de croire qu'il est ici question des Sabelliens, puisque ceux-ci affirment si ouvertement les souffrances du Père, qu'on les connaît plutôt sous le nom de Patripassiens que sous celui de Sabelliens? Et si, en disant que, selon eux, le Père n'a pas souffert, il a voulu parler des Noétiens, comment les reconnaître au milieu de termes si ambigus? Enfin, Epiphane a-t-il vraiment voulu dire, des uns et des autres, que, selon eux, le Père n'a pas souffert, puisqu'ils soutiennent également que le Père, le Fils et le Saint-Esprit ne forment ensemble qu'une seule et même personne? Mais Philastre, évêque de Brixiane, qui a écrit sur les hérésies un livre excessivement prolixe, et qui a compté cent vingt-huit sectes hérétiques, nomme les Sabelliens immédiatement après les Noétiens, et s'exprime ainsi : « Sabellius fut disciple de Noet, et professa exactement la doctrine de son maître: c'est pourquoi les membres de cette secte furent indifféremment appelés, dans la suite, Sabelliens , Patripassiens , Praxéaniens et Hermogéniens ; de Praxéas et d'Hermogène, qui habitèrent tous deux l'Afrique : ces divers hérétiques furent exclus de l'Eglise catholique avec tous ceux qui pensaient comme eux ».
Evidemment, après avoir cité les Noétiens, il a désigné, sous le nom de Sabelliens, tous ceux qui marchaient sur les traces de Noet il a indiqué les autres noms donnés aux membres de la même secte ; et, pourtant, il distingue parfaitement les Noétiens des Sabelliens, comme s'ils formaient deux sectes bien distinctes. Pourquoi ? Lui seul le sait.
Epiphane en son Anacéphaléose. ↩
