LXIX. Les Donatistes ou Donatiens,
LXIX. Les Donatiens ou Donatistes commencèrent par faire un schisme à cause de l'ordination de Cécilien, comme évêque de Carthage, ordination qui avait eu lieu contre leur gré. Ils l'accusaient de crimes qu'ils ne prouvaient pas, et prétendaient que ses consécrateurs étaient des traditeurs des saintes Ecritures. Après un examen contradictoire et qui mettait fin aux accusations, ils furent convaincus de mensonge : mais ils n'en persistèrent pas moins dans leur schisme : ils y ajoutèrent même l'hérésie, comme si les crimes réels de Cécilien, ou plutôt ses crimes reconnus supposés par. les juges , avaient fait disparaître l'Eglise d'un monde où appuyée sur les promesses de Jésus-Christ, elle doit subsister toujours : comme si, après avoir été détruite dans l'univers entier par son union avec les Cécilianistes, elle s'était réfugiée en Afrique pour ne plus subsister que dans le parti de Donat. Chez eux, on rebaptise les catholiques, et c'est bien en cela qu'ils font une plus formelle profession d'hérésie, puisque, du consentement de l'Eglise universelle, on ne réitère point le baptême donné par les- hérétiques comme on le donne ordinairement.
Donat fut, dit-on, le chef de ce parti: il vint de Numidie, souleva une partie des fidèles , contre Cécilien, et ordonna Majorin évêque de Carthage, avec l'assistance des évêques de sa faction qu'il avait appelés autour de lui. A Majorin succéda, dans le même parti hérétique, un autre Donat, dont l'éloquence contribua puissamment à donner de l'importance aux Donatistes : peut-être leur nom vient-il plutôt de lui que du fondateur même de leur secte. Nous avons de lui des écrits où l'on voit qu'il professait aussi sur la Trinité des principes opposés à l'enseignement catholique. Bien qu'il reconnût la même substance dans les trois personnes divines, il supposait le Père plus grand que le Fils, et le Fils plus grand que le Saint-Esprit. La majorité des Donatistes n'embrassa pas néanmoins son erreur relative à la sainte Trinité, et il serait, je crois, difficile d'en trouver parmi eux un seul, pour savoir ce que Donat pensait à ce, égard. A Rome, on les appelle Montagnards leurs coréligionnaires d'Afrique leur envoient un évêque de leur parti, et parfois, quand ils le jugent à propos, leurs évêques africains viennent en cette ville pour-en ordonner un. On trouve encore en Afrique, comme sectateurs de Donat, les Circoncellions, hommes grossiers, d'une audace peu commune, célèbres par les crimes atroces qu'ils commettent contre les autres, follement cruels contre eux-mêmes. Ces malheureux se font eux-mêmes mourir de différentes manières, surtout en se jetant dans des précipices, dans l'eau ou dans le feu : et ceux qu'ils peuvent amener à leurs erreurs, ils les poussent, hommes et femmes, à se détruire, ou parfois, à se faire tuer par d'autres, les menaçant de mort, pour le cas où ils ne voudraient pas y consentir. Cependant les Circoncellions ne sont approuvés que d'un petit nombre de Donatistes; mais ceux-ci ne se regardent point comme souillés par leur union avec de tels hommes, eux qui reprochent follement à l'univers chrétien les accusations élevées contre quelques africains inconnus. Plusieurs schismes se sont déclarés parmi les Donatistes : les uns se sont séparés des autres pour former des sociétés particulières et différentes ; mais la plus grande,partie de la secte est restée étrangère à ces divisions intestines. Une centaine d'évêques Donatistes ayant écarté Primien , ordonnèrent Maximien comme évêque de Carthage : les trois cent dix autres, auxquels s'en étaient joints douze, qui avaient assisté à cette ordination sans y donner leur consentement, le condamnèrent pour une faute abominable. Maximien les força à apprendre que même hors de l'Eglise, on peut conférer le baptême de Jésus-Christ, car ils reçurent dans leur communion quelques évêques de son parti avec ceux qu'ils avaient baptisés en dehors de leur secte, sans leur interdire l'exercice de leur dignité, sans réitérer le baptême à qui que ce fût : ils ne cessèrent point d'agir auprès de la puissance séculière, pour les amener à résipiscence, et ils ne craignirent point de se souiller en vivant en communion avec des hommes dont les crimes avaient été exagérés et flétris par leur propre concile.
