CHAPITRE XXV. LA CONCUPISCENCE APRÈS LE BAPTÊME, C'EST LA LANGUEUR APRÈS UNE MALADIE.
28. On me demandera sans doute comment cette concupiscence de la chair peut encore exister dans le chrétien régénéré, après la rémission de tous ses péchés. Comment admettre que ce soit elle qui préside encore à la génération même dans les parents qui ont reçu le baptême? supposé même qu'elle existe en eux, elle n'y est pas un péché, comment donc sera-t-elle un péché dans l'enfant qui vient de naître? Je réponds que la concupiscence de la chair est effacée dans le baptême, non pas de manière à ne plus exister, mais de manière à n'être plus un péché. Elle a perdu son caractère de culpabilité, mais elle existe, et elle existera jusqu'à ce que toute notre faiblesse ait disparu sous les progrès quotidiens de la rénovation de l'homme intérieur, c'est-à-dire quand l'homme extérieur aura revêtu l'incorruptibilité. Cette concupiscence, ne l'oublions pas, n'est pas un être substantiel, un corps ou un esprit; ce n'est qu'une certaine affection d'une mauvaise qualité, une sorte de langueur. Ne disons donc pas que ce qui reste, c'est ce qui n'a pas été remis, car il est écrit : « Le Seigneur se rend propice à toutes nos iniquités » ; mais il faut attendre le parfait accomplissement de ces autres paroles : « C'est Dieu qui guérit toutes vos langueurs, qui rachète votre vie de la corruption1 » ; jusque-là la concupiscence charnelle demeure dans ce corps de mort. Mais nous devons résister courageusement à ses convoitises, si nous ne voulons pas que le péché règne dans notre corps mortel. Toutefois il est certain que cette concupiscence va chaque jour s'affaiblissant sous les coups, de la continence, du progrès dans la perfection et surtout sous les glaces de la vieillesse. Au contraire, quand elle rencontre des hommes qui se constituent ses aveugles esclaves, elle prend sur eux un tel empire, que, malgré les défaillances de l'âge, et l'impuissance du corps, elle ne cesse de les jeter dans une sorte de fureur impudique.
Ps. CII, 3, 4. ↩
