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Il nous reste à exposer comment on doit 'étudier, quand on a entrepris de vivre comme nous l'avons dit. Nous ne pouvons avoir que deux moyens de nous instruire : l'autorité et la raison. Dans l'ordre du temps, l'autorité précède; dans la réalité, la raison l'emporte. Autre chose est ce que nous faisons d'abord, autre chose ce que nous désirons et estimons davantage. L'autorité des hommes de bien paraît plus utile à la multitude ignorante, et la raison plus convenable aux savants. Cependant , comme tous sont ignorants avant d'apprendre, comme nul ignorant ne sait dans quelles dispositions il doit se présenter devant ses maîtres, ni quel genre de vie peut le préparer à la science; l'autorité seule peut ouvrir la porte, quand on aspire à connaître quels sont les trésors mystérieux et divins. Le seuil une fois franchi avec assurance, on s'applique à suivre les règles de la vie parfaite , et par ce moyen, qui donne la docilité , on apprendra enfin quelle profonde raison il y a dans les préceptes qu'on a observés sans les comprendre, et ce qu'est cette raison qui succède aux langés de l'autorité, que l'on suit maintenant d'un pas ferme et que l'on comprend; et ce qu'est cette intelligence en qui tout est renfermé, ou plutôt, qui est tout; et ce que c'est, en dehors de tout, que le principe de tout.
Peu arrivent, en cette vie, à cette connaissance, et nul ne peut aller au delà, même en l'autre vie. Quant à ceux qui se contentent de l'autorité pour s'appliquer aux bonnes mœurs et aux saints désirs, qui dédaignent ou sont incapables de se livrer à l’étude profitable de sciences libérales, je ne sais comment leur donner le nom d'heureux, pendant qu'ils sont parmi les hommes; mais, je le crois fermement sitôt qu'ils auront quitté ce corps, ils seront délivrés avec plus ou moins de facilité, selon que leur vie aura été plus ou moins irréprochable.
