A NEPOTIEN.
Que le prêtre ne doit pas se mêler de mariage. — Que les biens de l'Eglise doivent être distribues aux pauvres — soulèvement général à Rome contre le Livre de la virginité.
En 395.
Que le prêtre qui doit toujours louer la continence ne se mêle pas de mariage; car pourquoi engager une vierge à se marier, lui qui a lu dans l'apôtre saint Paul : « Que ceux qui ont des femmes, vivent comme s'ils n'en avaient point? » Pourquoi conseiller le mariage à une veuve, lui qui n'est entré dans la cléricature qu'après avoir renoncé aux secondes noces? Comment un clerc, qui doit mépriser les richesses et renoncer à son patrimoine, peut-il se résoudre à faire valoir le bien d'autrui et se charger du soin d'une famille étrangère? C'est un vol que d'usurper le bien d'un ami, mais c'est un sacrilège que de voler les biens dont l'Église nous a confié l'administration. Il n'est rien de plus inhumain due de ménager par une timide prévoyance l'argent reçu pour les pauvres, ou même (ce qui est évidemment coupable) d'en détourner quelque partie; tandis qu'on laisse mourir de besoin une infinité de malheureux auxquels il était destiné. Dans le temps que je souffre de faim, vous prétendez mesurer mes besoins et peser mes morceaux. Ou donnez-moi sans aucun retard ma part de l'argent que vous avez reçu pour le soulagement des pauvres, ou, si vous voulez le ménager avec tant de précaution, laissez à celui qui me fait cette aumône le soin de le distribuer lui-même. Je ne dis pas que vous vous enrichissez de ce que l'on vous remet pour subvenir à mes besoins; mais personne ne saurait mieux due moi conserver un bien qui m'appartient. L'on ne peut faire un meilleur usage des ressources de l'Église, due de les employer au soulagement des pauvres, sans en rien réserver pour soi-même.
Après que tout le monde s'est déchaîné contre le livre de la Virginité que j'ai composé à home, et dédié à la vertueuse Eustochia, vous m'avez engagé malgré moi à rompre le silence que je gardais dans ma retraite de Bethléem et à m'exposer encore une fois aux calomnies des hommes. Car, pour éviter leurs censures, il faudrait me résoudre à ne plus écrire (mais vous ne me l'avez pas permis), ou, si je voulais encore donner quelque ouvrage au public, je devais m'attendre à me voir en butte à tous les traits de la calomnie. Mais enfin je supplie mes adversaires de demeurer en paix et de ne plus m'attaquer; car je les ai traités dans mes écrits, non pas avec la haine d'un ennemi, mais avec la douceur d'un véritable ami; et au lieu de m'élever ouvertement contre les pécheurs, je me suis borné à les avertir de ne plus pécher. Au reste, je ne me suis pas épargné moi-même ; J'ai eu part comme les autres à ma propre censure, et, avant de tirer la paille que j'apercevais dans l'oeil de mon frère, j'ai eu soin d'abord d'ôter la poutre que je sentais dans le mien. Je n'ai porté aucune atteinte à la réputation des autres, et on ne peut m'accuser d'avoir nommé quelqu'un dans mes ouvrages; je me suis toujours contenté de parler contre les vices en général, sans jamais attaquer personne en particulier. Ceux qui s'emportent contre moi avec tant de chaleur indiquent qu'ils se sentent coupables des désordres que j'ai condamnés.
