41.
La raison s'aperçut que les nombres faisaient tout en musique, qu'ils régnaient sur le rythme et sur l'harmonie. Elle étudia leur nature avec le plus grand soin; elle trouva qu'il y en avait de divins, d'éternels, surtout en observant qu'ils l'avaient aidée jusqu'alors à tout disposer avec ordre. Déjà elle voyait avec la plus grande peine qu'ils perdaient de leur éclat et de leur pureté en passant par des bouches humaines; et comme ce qui fait l'objet des contemplations de l'esprit est toujours présent, immortel; comme les nombres étaient tels, tandis que le son, parce qu'il est sensible, passe et n'a plus d'existence que dans la mémoire, la raison permit aux poètes (ne devaient-ils pas en effet remonter à la génération de toutes choses?) de supposer dans une fable rationnelle que les Muses étaient filles de Jupiter et de la Mémoire. Ce qui fit donner le nom de Musique à cet art qui parie aux sens et à l'esprit.
