2.
Nous nous assîmes donc le plus commodément possible dans le lieu indiqué; et, m'adressant aux deux jeunes gens : En dépit de ma sévérité contre vous, leur dis-je, quand vous traitiez en enfants un sujet d'un si haut intérêt, il me semble néanmoins que ce n'est pas sans un ordre et une faveur de Dieu, que le temps s'est consumé en reproches faits à votre légèreté, et qu'un tel sujet a été ajourné jusqu'à l'arrivée d'Alype. Déjà je lui ai fait connaître complètement la question , et le point où nous en sommes arrivés : ainsi donc, es-tu prêt, Licentius, à défendre, d'après ta définition, la cause que tu as embrassée? Je crois m'en souvenir, tu as dit que l'ordre est le mobile par lequel Dieu gouverne tout. — Je suis prêt, répondit-il, autant que je le puis être. — Comment donc, ajoutai-je, Dieu gouverne tout avec ordre? Veux-tu dire qu'il se conduit aussi lui-même avec ordre, ou que l'ordre préside à la direction de tout ce qui n'est pas lui? — Où tout est bon,l'ordre n'est point, reprit-il ; car il y a là une égalité parfaite qui n'a pas besoin d'ordre. — Tu nies donc, qu'en Dieu, tout soit bon? — Non. — J'en infère, ajoutai-je, que ni Dieu, ni rien de ce qui est en lui ne sont dirigés avec ordre. — Il me l'accorda. — Mais alors, dis-je, tout ce qui est bien, te paraît-il n'être pas? — Au contraire , dit-il, c'est le bien qui existe véritablement. — Où est donc tout ce que tu as avancé, savoir, que tout ce qui existe est régi avec ordre, et que rien absolument n'est séparé de l'ordre ? — Mais il y a aussi le mal , reprit-il, qui fait que l'ordre renferme le bien. Car ce n'est pas le bien seulement qui est dirigé avec ordre, mais le bien simultanément avec le mal. Et quand nous disons tout ce qui existe, nous ne parlons pas uniquement du bien; d'où il suit que l'ordre règne en même temps dans tout ce que Dieu gouverne.
