CHAPITRE IV. L’AME D'UN INSECTE SUPÉRIEURE A LA LUMIÈRE CORPORELLE.
4. Mais peut-être que troublés par la vigueur de ces conclusions ils me demanderaient si l'âme d'une mouche me paraîtrait supérieure à la lumière. Ma réponse serait assurément affirmative, et sans me laisser effrayer par la petitesse de cet insecte, il me suffirait de savoir qu'il est vivant. Je demande donc, à mon tour, ce qui donne la vigueur à des membres si petits, ce qui dirige un si petit corps selon son appétit naturel, ce qui imprime le mouvement et la cadence à ses pieds, ce qui modère et fait vibrer ses petites ailes pendant son vol. Quel que soit ce principe, quiconque l'étudie attentivement, voit, dans ce petit être, briller quelque chose de si grand, qu'il laisse à une distance infinie la lumière la plus vive qui puisse frapper les yeux.
Ce quelque chose, personne n'en doute, ne peut être perçu que par l'intelligence, et à ce titre il l'emporte de beaucoup sur tout ce qui est sensible, et sur la lumière elle-même; ainsi le veulent les lois divines. En effet, le premier fondement de toute connaissance ne repose-t-il pas sur ce principe que nous mettons une différence essentielle entre percevoir par. l'intelligence et sentir par le corps, et que la première de ces deux opérations l'emporte infiniment sur la seconde? Comment dès lors ne pas préférer les choses intelligibles aux choses sensibles, quand l'intelligence est elle-même si supérieure aux sens ?
