2.
[3] Le changement est un mouvement qui tend sans; cesse de l'état présent à un état différent, et un mouvement de ce genre prend deux formes : dans l'une, il tend sans cesse vers le bien, et là, le progrès ne connaît pas d'arrêt, puisque l'espace parcouru est conçu comme illimité ; dans l'autre, il tend vers l'état opposé, dont l'essence est de rie pas avoir d'existence : le contraire du bien, en effet, comme on l'a dit plus haut, s'oppose à lui à peu près dans le sens où nous disons que ce qui n'est pas s'oppose à ce qui est, et que la non-existence s'oppose à l'existence. Or dans la tendance et dans le mouvement qui s'accompagnent de variation et de changement, il est impossible à la nature de rester immuable en elle-même, mais notre volonté tend tout entière vers un but, parce que son désir du bien la met naturellement en mouvement.
[4] Mais le bien a deux formes: l'une véritable et naturelle, l'autre différente de celle-là, et colorée d'une apparence de bien. Leur critérium est l'intelligence établie au dedans de nous. On court avec elle la chance d'atteindre le véritable bien, ou le risque de se laisser détourner du bien par quelque apparence trompeuse, et de tomber dans l'état contraire, comme il arriva, dans la fable païenne, à la chienne qui, ayant vu dans l'eau l'ombre de ce qu'elle portait dans sa gueule, lâcha sa véritable pitance, et après avoir ouvert la gueule pour avaler l'image de son dîner, se trouva en proie à la faim.
[5] Il arriva donc que l'intelligence induite en erreur dans son désir du vrai bien, fut détournée vers ce qui n'est pas; trompée par l'instigateur et l'inventeur du vice, elle se laissa persuader que le bien était tout l'opposé du bien (car la tromperie fût restée sans effet, si l'apparence du bien n'avait été appliquée, à la façon d'un appât, à l'hameçon du vice) ; et l'homme tomba volontairement dans ce malheur quand il eut été amené par le plaisir à se soumettre à l'ennemi de la vie. Recherchez maintenant avec moi tous les attributs convenables aux idées que l'on se fait de Dieu, la bonté, la sagesse, la justice, la puissance, l'incorruptibilité et tout ce qui caractérise Dieu. [6] Etant bon, il prend donc en pitié l'homme déchu; étant sage, il n'ignore pas le moyen de le sauver. Le discernement du juste peut rentrer aussi dans la sagesse, car on ne saurait allier à la démence la véritable justice.
