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Alype me dit alors : Quel grand modèle de vie tu nous places sous les yeux ! Tu as tout dit en peu de mots; nous sommes chaque jour avides de tes leçons; mais aujourd'hui tu nous as inspiré plus de zèle encore et plus d'ardeur pour ce genre de vie. Je voudrais y voir parvenir et s'y attacher intimement, s'il était possible, non-seulement nous, mais encore tous les hommes : ces préceptes deviendraient aussi faciles à suivre qu'ils sont admirables à entendre. Comment, hélas ! se fait-il, puisse ce malheur s'éloigner de nous ! Comment se fait-il qu'en entendant ces règles, l'esprit humain les proclame célestes, divines, entièrement vraies, et qu'il agisse différemment quand il faut y atteindre? Aussi je suis profondément convaincu e que, pour vivre ainsi, il faut des hommes divins ou un secours divin.
Je répondis : Actuellement, Alype, c'est ma parole qui exprime ces règles de vie, que tu accueilles avec tan Me plaisir, comme toujours; mais elles ne sont point de mon invention, tu le sais parfaitement. Elles remplissent les livres d'hommes grands et presque divins; et cette observation, je la dois non pas à toi, mais à ces jeunes gens qui auraient quelque droit de les dédaigner, si elles ne reposaient que sur mon autorité. Jamais je ne leur demanderai de m'en croire. que sur les preuves dont j'appuierai mon enseignement ; et c'était, je présume, pour les stimuler par l'importance du sujet, que tu as parlé de la sorte. Ces règles ne sont point difficiles à suivre pour toi ; telle est ton avidité à les saisir, et l'élan de ton admirable nature à les pratiquer, que si je suis ton maître en paroles, tu es le mien en actions. Je n'ai aucun motif ni même aucun prétexte de mentir. Un éloge immérité ne stimulerait point, je crois, ton ardeur ; ceux qui sont ici nous connaissent tous deux, et ni l'un ni l'autre n'est inconnu à celui qui recevra cet écrit.
