29.
Quant aux hommes qui s'adonnent à la pratique du bien et des bonnes mœurs, si tes paroles sont d'accord avec ta pensée, tu en crois le nombre plus restreint que cela ne me paraît probable : beaucoup te sont entièrement inconnus; et chez ceux que tu connais, ce qui est précisément digne d'admiration t'échappe aussi. Tout cela est en effet du domaine de l'âme qui est inaccessible aux sens, et qui souvent , pour s'accommoder au langage des hommes vicieux, accorde ses paroles avec ce qu'elle paraît ou approuver ou désirer. Elle agit souvent contre son gré , afin d'éviter la haine d'autrui, ou l'accusation d'ineptie ; et comme les actes nous arrivent par le témoignage des oreilles ou des yeux, il nous est difficile de nous écarter de leur appréciation. C'est ce qui nous empêche de connaître un bon nombre d'hommes aussi bien qu'ils se connaissent et que les connaissent leurs amis. Tu peux le comprendre en te rappelant quelques grandes qualités que seuls nous voyons chez les nôtres.
Une des causes qui induisent ainsi en erreur, et ce n'est pas la moindre, c'est que beaucoup se convertissent subitement à une vie meilleure et digne d'admiration; et qu'on les croit toujours ce qu'ils étaient, jusqu'à ce que des actions d'éclat révèlent ce qu'ils sont. Sans aller plus loin, quiconque eût naguère connu ces jeunes gens, croirait-il facilement qu'ils recherchent aujourd'hui les grandes vérités, avec tant de zèle, et qu'à tel âge ils ont déclaré une telle guerre aux plaisirs? Ainsi rejetons cette opinion; car ce secours divin dont tu as fait, comme il était convenable, une mention pieuse à la fin de ton discours, produit dans tous les peuples et beaucoup plus largement que plusieurs ne se l'imaginent, l'oeuvre de sa miséricorde. Mais revenons, s'il te plaît, à l'ordre de notre discussion, et après avoir suffisamment parlé de l'autorité, voyons ce qu'exige la
