31.
Voyons en premier lieu, dans quelles circonstances on emploie d'ordinaire ce mot que nous appelons la raison. Ce qui doit nous frapper avant tout, c'est que les sages de l'antiquité ont défini l'homme de la manière suivante : L'homme, disent-ils, est un animal raisonnable et mortel. Le terme d'animal désigne ici le genre, et les deux autres termes indiquent deux différences, destinées, je crois, à faire connaître à l'homme où il doit revenir et d'où il doit s'éloigner. Son âme en partant d'elle-même s'était jetée misérablement dans la matière; il lui faut revenir à la raison. En disant qu'il est raisonnable, on le distingue des bêtes; et en l'appelant mortel on montre combien il diffère de ce qui est divin. S'il ne s'attache à la raison, il se confondra avec les animaux; s'il ne s'éloigne de la matière, il ne pourra se diviniser.
Mais les savants appliquent souvent leur esprit et leur pénétration à distinguer ce qui est raisonnable de ce qui est rationnel: le but que nous poursuivons demande que nous les imitions. Ils appellent donc raisonnable ce qui fait ou ce qui peut faire usage de la raison, et rationnel ce qui est produit ou dicté par elle.
Ainsi nous pouvons dire de ces bains et de notre conférence qu'ils sont rationnels, et nommer raisonnables soit celui qui a construit ces bains, soit nous qui parlons. La raison par conséquent procède de pâme raisonnable, et s'applique à des actes et à des discours rationnels.
