18.
Mais voici pour moi une difficulté : ce sage vivant parmi les hommes et y demeurant en corps, on ne saurait le nier, comment se peut-il que ce corps aille deçà et delà et que l'esprit demeuré immobile? Tu peux dire, il est vrai, qu'un vaisseau se meut et que les hommes qu'il renferme sont en repos, quoique ceux-ci , nous l'avouons, le maîtrisent et le gouvernent. Mais ne le dirigeassent-ils que de la pensée, et le fissent-ils aller ainsi au gré de leurs désirs, quand le vaisseau est en mouvement, ceux qui le montent né peuvent eux-mêmes éviter le mouvement. — L'esprit, dit Licentius, n'est point dans le corps, soumis aux ordres du corps. — Je ne le dis pas non plus, répondis-je, mais le cavalier, à son tour, n'est pas sur le cheval pour en recevoir la loi; et néanmoins tout en faisant marcher le cheval à son gré, il faut qu'il en subisse le mouvement. — Mais il peut, reprit-il, rester immobile sur ce cheval. — Tu nous forces, lui dis-je, à définir le mouvement; mais si tu le peux, définis-le toi-même. —Continue, reprit-il, à me rendre service, car je persiste dans ma demande, et pour t'éviter la peine de me l'adresser de nouveau, si je peux définir je le déclarerai quand j'en serai capable.
A ces paroles, un serviteur, que nous avions chargé de cet office, accourut pour nous dire que l'heure du dîner était arrivée. Ce serviteur, dis-je alors, nous force non pas à définir le mouvement, mais à le montrer aux yeux. Allons donc, passons de ce lieu dans un autre; le mouvement n'est que cela, si je ne me trompe. On rit et nous partîmes. —
