V. 1 et 2.
« Qui pourra se comparer au sage, et qui connaît comme lui le dénouement des paroles problématiques? La sagesse de l'homme parait sur son visage, et l'homme fort change souvent de couleur et de visage. » On a pu voir dans les versets précédents combien le nombre des gens de bien est petit; et la réponse que l'Ecclésiaste y fait aux conséquences qu'on pouvait tirer de ce principe montre évidemment que Dieu n'est point auteur du mal ni du péché; que si les hommes sont méchants, ils le sont par leur propre volonté, Dieu les ayant faits bons et justes quand il les créa. Il va plus loin en ce passage où il fait une énumération des grâces que Dieu a faites à l'homme il parle avec complaisance de la sagesse, de la lumière de la raison , et de la prudence dont Dieu a fait part à l'homme pour se conduire et pour prévoir ce qui peut lui arriver; il relève aussi la connaissance qu'il a des mystères divins et des secrets cachés en Dieu, que l'homme est capable de pénétrer par un sentiment intérieur de son esprit et de son coeur. In arcana ejus sensu cordis intrare. Il semble même qu'il parle indirectement de sa sagesse extraordinaire, et qu'il dit que personne n'a su comme lui trouver l'explication des problèmes les plus obscurs et les plus difficiles ; que sa grande sagesse n'était point cachée dans son âme, mais qu'elle paraissait sur tout son extérieur; ce qui le faisait admirer de son peuple et de tous ceux qui le voyaient.
Au reste, quoique l'Ecclésiaste nous assure que la sagesse est peinte sur le visage des sages, il n'est pas toutefois si facile de faire le discernement des vrais et des faux sages , de plusieurs qui affectent un extérieur bien composé et d'un petit nombre qui sont tels qu'ils paraissent au dehors. Il n'est pas facile non plus de l'aire le discernement des faux et des vrais savants parmi les expositeurs des livres sacrés; car bien qu'il y en ait plusieurs qui font profession de bien expliquer les Ecritures, on en trouve cependant très peu qui soient capables de nous découvrir le sens propre et naturel de ces divins livres. Et cum sint plurimi qui scripturarum occulta dicantur posse se solvere, rarus est qui verain inveniat solutionem.
V. 3, 4 et 5. « Pour moi , j'observe la bouche du roi et les préceptes que Dieu a confirmés avec serment. Ne vous hâtez point de vous retirer de devant lui; et ne persévérez pas dans l'oeuvre mauvaise, parce qu'il fera tout ce qu'il voudra. Sa parole est pleine de puissance, et nul ne lui peut dire . Pourquoi faites-vous ainsi? » L'auteur semble parler de l'obéissance que nous devons aux rois et aux puissances de la terre, si recommandée par l'apôtre saint Paul. Ce sens est encore plus marqué dans les Septante, qui ont lu à l'impératif: « Observez la bouche du roi; »mais pour moi, j'aime mieux l’entendre de ce roi dont David disait : « Seigneur, le roi se réjouira par votre puissance. » L'Ecriture dit aussi dans un autre endroit, pour nous faire connaître que le Père et le Fils possèdent un même royaume : « O Dieu! donnez au roi votre jugement, et votre justice au fils du roi. »L'Evangile nous apprend de même que le Père ne juge personne , niais qu'il a donné au Fils tout le jugement. Ce roi, qui est fils de Dieu, est fils du Père, qui est roi comme son fils : c'est donc de ce roi qu'il faut observer les préceptes et qu'il faut faire la volonté. Nous lisons enfin dans le livre de Tobie : « Il est important de cacher le secret du roi. » Ce que l'Ecclésiaste nous recommande particulièrement est de ne point examiner les raisons que Dieu a eues d'ordonner chaque chose; mais ce que nous devons faire, c'est de nous hâter d'accomplir avec un coeur plein de piété tout ce que nous verrons que Dieu nous commande dans sa sainte loi et dans les livres des prophètes. Ces paroles mystérieuses et secrètes ne doivent pas être annoncées légèrement devant toutes sortes de personnes , et nous devons nous-mêmes être fort réservés à dire nos sentiments. Ce qui suit « Ne persévérez pas dans l'oeuvre mauvaise, etc.,» signifie : Ne persévérez pas dans les médisances et dans les détractions, dans les paroles malhonnêtes, dans le luxe , dans l'avarice et dans l'impudicité ; car si vous persévérez à commettre tous ces crimes, le démon, qui tient l'empire du vice et du péché, fera de vous un enfant de perdition et de colère et vous traitera comme son esclave.
