CHAPITRE VII. INDISSOLUBILITÉ DU MARIAGE.
Garder la continence, c'est l'état le plus parfait; rendre le devoir conjugal est une chose permise; l'exiger en dehors des nécessités de la génération, c'est un péché véniel; commettre la fornication ou l'adultère, c'est un péché mortel. La charité conjugale exige donc que l'un des époux, sous prétexte de mériter davantage, se garde bien d'être pour l'autre une cause de damnation. Car « celui qui renvoie sa femme, sauf le cas de fornication, la pousse à l'adultère1 ». En effet, le pacte nuptial est si sacramentel qu'il n'est pas même rompu par la séparation des époux. Tant que son époux est vivant, eût-elle été renvoyée par lui, la femme commet l'adultère en connaissant un autre homme; et le mari, en la renvoyant, s'est fait la cause de ce crime.
7. Puisqu'il est permis de renvoyer sa femme surprise en adultère, est-il aussi permis d'en épouser une autre? L'Ecriture donne lieu, sur ce point, à une difficulté assez grave. L'Apôtre, promulguant en cela un précepte du Seigneur, déclare que la femme ne doit point se séparer de son mari; et que, si, elle s'en sépare, elle doit rester sans mari, ou se réconcilier avec le sien2. En voici la raison. En se séparant d'un mari qui n'est point adultère et en suspendant toute relation conjugale, elle exposerait son époux à tomber dans l'adultère ou l'impureté. Mais elle peut en toute justice se réconcilier avec lui, soit en tolérant son inconduite, si pour elle-même la continence est impossible, soit surtout en le ramenant à des sentiments meilleurs. Dès lors je ne vois pas sur quoi l'on peut s'appuyer pour soutenir que l'homme, dont la femme est adultère, peut, après l'avoir quittée, en épouser une autre, puisque, dans le même cas, la femme ne peut convoler à de nouvelles noces. S'il ne peut en épouser une autre, c'est que le lien conjugal d'abord formé dans le but d'avoir des enfants est tellement indissoluble, qu'il ne peut être rompu pour chercher la génération dans un autre mariage. Autrement, tel homme dont la femme est stérile, pourrait la renvoyer et en épouser une autre, avec laquelle il aurait des enfants. Or , agir ainsi serait un crime; la loi en vigueur de nos jours et appuyée sur la coutume romaine, ordonne de n'avoir qu'une seule femme vivante ; et cependant après le divorce pour cause d'adultère, de la part de l'un ou de l'autre des deux époux, il pourrait encore naître des enfants, s'il était permis de contracter un nouveau mariage. La loi divine le défend d'une manière absolue, et c'est là ce qui prouve à tout homme réfléchi la force irrésistible du lien conjugal. Pourrait-il en être ainsi, si le sacrement ne venait fortifier la faiblesse humaine et s'imposer aux hommes jusqu'à leur faire craindre un châtiment infaillible, s'ils renoncent au lien conjugal, où s'ils cherchent à le dissoudre ? Une séparation peut avoir lieu, mais l'union des époux ne sera, pas brisée; ils resteront époux, même après s'être séparés, et s'ils s'abandonnent à la licence de leurs moeurs, ils se rendent coupables d'adultère à l'égard de ceux avec lesquels ils restent unis, la; femme à l'égard de son mari et réciproquement. Le mariage, jusqu'à ce point indissoluble, n'est possible que dans la cité de notre Dieu et sur sa montagne sainte3.
