XXV.
J’ai été moi-même témoin du fait suivant. Des parents, fuyant les rigueurs de la persécution, laissèrent leur fille encore enfant entre les mains d’une nourrice. Celle-ci porta l’enfant aux magistrats. Comme, à cause de son âge, elle ne pouvait pas encore manger de viande, on lui donna un peu de pain trempé de vin, reste d’un sacrifice précédent. Plus tard, la mère reprit sa fille. Mais l’enfant ne pouvait déclarer un crime dont elle n’avait aucune connaissance. Elle fut donc portée à l’église, alors que j’offrais moi-même le saint sacrifice. Mais à peine fut-elle au milieu de l’assemblée des fidèles, qu’elle ne put supporter nos prières. Elle se mit à pleurer; dans sa fureur étrange, elle se frappait, se jetait par terre, se tordait comme sous la main du bourreau, enfin elle indiquait à sa manière qu’elle n’était pas digne d’assister à nos mystères. A la fin du sacrifice, quand le diacre présenta le calice aux fidèles, il s’approcha aussi de l’enfant; mais elle, comme frappée par la majesté divine, détournait la tête, serrait les lèvres, repoussait le calice. Le diacre persista cependant et, malgré sa résistance, il glissa dans la bouche de l’enfant quelques gouttes de vin consacré. Alors vinrent les convulsions et les vomissements. L’Eucharistie ne pouvait rester dans un corps et dans une bouche souillée le sang divin en sortait violemment. C’est ainsi que le Seigneur manifesta sa puissance et sa majesté ; il éclaira lui-même les ténèbres et le ministre de Dieu découvrit le crime dans toute son horreur.
