CHAPITRE XV. L’ÉCRITURE SAINTE COMPARÉE AU FIRMAMENT ET LES ANGES AUX EAUX SUPÉRIEURES (Gen. I, 6).
16. Mais quel autre que vous, Seigneur, a étendu au-dessus de nous ce firmament divin de vos Ecritures? « Le ciel sera roulé comme « un livre (Is. XXIV, 4), et il est maintenant étendu comme une peau ( Ps. CIII, 2) » Seigneur, l’autorité de votre divine Ecriture n’en est que plus sublime, quand les mortels, par qui vous l’avez publiée, ont passé par la mort. Et vous savez, Seigneur, que vous avez revêtu de peaux les premiers hommes, devenus mortels par le péché ( Gen. III, 21). Et vous avez étendu comme une peau le firmament de vos saints livres, ces paroles d’une concordance admirable, que vous avez posées au-dessus de nous par le ministère d’hommes mortels. Et leur mort même a étendu avec plus de force le firmament d’autorité de vos paroles qu’ils ont annoncées: il est étendu sur ce monde inférieur, plus fort et plus haut que pendant leur vie. Car vous n’aviez pas encore étendu ce ciel comme une peau; vous n’aviez pas encore rempli la terre du bruit de leur mort.
17. Oh! faites-nous voir, Seigneur, ces cieux, ouvrage de vos mains. Dissipez ce nuage dont vous les voilez à nos yeux. Là résident ces oracles qui inspirent la sagesse aux petits enfants (Ps. XVIII, 8). Exaltez votre gloire, mon Dieu, par la bouche de ces enfants à la mamelle, qui bégaient à peine. Non, je ne sache pas d’autres livres plus puissants pour anéantir l’orgueil, pour détruire l’ennemi ( Ps. VIII, 4, 3) qui se retranche contre votre miséricorde dans la justification de ses crimes. Non, Seigneur, je ne connais point de paroles plus chastes, plus persuasives d’humilité, plus capables de m’apprivoiser à votre joug, et d’engager mon coeur à un service d’amour. Père infiniment bon, initiez-moi à leur intelligence; accordez cette grâce à ma soumission, puisque vous ne les avez si solidement affermies qu’en faveur des âmes soumises.
18. Il est d’autres eaux au-dessus de ce firmament; eaux immortelles, je crois, et pures de la corruption de la terre. Que ces eaux louent votre nom! que, par delà les cieux vos louanges s’élèvent de ces choeurs angéliques, qui n’ont pas besoin de considérer et de lire notre Firmament pour connaître votre Verbe! Car ils voient votre face ( Matth. XVIII, 10), et lisent sans succession de syllabes les décrets de votre éternelle volonté. C’est à la fois lecture, élection et dilection: ils lisent toujours, et ce qu’ils lisent ne passe point; ils lisent par élection et par dilection l’immuable stabilité de votre conseil: livre toujours ouvert, et qui ne sera jamais roulé, parce que vous êtes vous-même ce livre, et que vous l’êtes éternellement; parce que vous avez créé vos anges supérieurs à ce firmament, que vous avez affermi au-dessus de l’infirmité des peuples de la terre, afin que cette infirmité, levant ses regards jusqu’à lui, y lise la miséricorde, qui daigne annoncer dans le temps le Créateur des temps : car « votre miséricorde, Seigneur, est dans le ciel, et votre vérité s’élève jusqu’aux nues (Ps. XXXV, 6).» Les nues passent, mais le ciel demeure; les (506) prédicateurs de votre parole passent de cette vie dans une autre, mais votre Ecriture s’étend sur tous les peuples jusqu’à la fin des siècles.
« Le ciel même et la terre passeront, mais vos paroles ne passeront pont ( Matth. XXIV, 35). » — Cette peau sera pliée, et l’herbe qu’elle couvrait se flétrira dans sa beauté, mais votre Verbe demeure éternellement (Is. XL, 6). Nous ne le voyons maintenant que dans l’énigme des nues et le miroir du ciel ( I Cor. XIII, 12); il ne nous apparaît pas tel qu’il est; car nous-mêmes, malgré l’amour de votre Fils pour nous, « nous ne voyons pas encore ce que nous serons après cette vie. » Il nous a regardés à travers le voile de sa chair; il nous a comblés de ses caresses, et embrasés de son amour; et nous courons après l’odeur de ses parfums. Mais, au jour de son apparition, nous serons semblables à lui, parce que nous le verrons tel qu’il est. (I Jean III, 2)» Tel qu’il est, Seigneur : ainsi nous le verrons, mais ainsi nous ne le voyons pas encore.
