XXIX.
« Mais la mort a régné depuis Adam jusqu'à Moïse, même en ceux qui n'avaient point péché semblablement à la prévarication d'Adam 1. » Cette phrase peut s'entendre de deux manières : Ou bien, « la mort a régné sur ceux qui avaient quelque ressemblance avec Adam prévaricateur, » car elle a frappé ceux-mêmes qui étaient exempts de péché, parce qu'ils avaient reçu de lui une chair mortelle. Ou bien : « La mort a régné même sur ceux qui avaient péché d'une autre manière que lui, » c'est-à-dire avant la Loi; et dans ce sens, on doit regarder comme ayant péché semblablement à la prévarication d'Adam, ceux qui avaient reçu la Loi ; car Adam commit son péché après avoir reçu un commandement formel. Quoi qu'il en soit, il est certain que dans ces paroles de l'Apôtre : «Jusqu'à Moïse, » il faut comprendre tout le temps de la Loi. Enfin, si Adam est appelé la figure de Celui qui devait venir, » c'est par opposition : car, de même que la mort nous vient d'Adam, ainsi la vie nous vient de Notre-Seigneur.
« Mais il n'en est pas du don comme du péché 2. » Le premier a l'avantage de deux manières. Ou bien en ce sens que la grâce est beaucoup plus féconde : elle nous procure une vie éternelle ; tandis que le règne de la mort qui a eu pour principe le péché d'Adam, n'est que temporel. Ou bien en ce sens que la condamnation d'un seul péché est devenue en Adam la cause de la mort d'une multitude d'hommes ; au lieu que le pardon d'une multitude de péchés par Notre-Seigneur Jésus-Christ nous a procuré la grâce d'une vie éternelle. L'Apôtre explique ensuite une autre différence: « Et il n'en est pas du don comme du péché commis par un seul ; car l'arrêt de condamnation vient d'un seul, tandis que la grâce de la justification délivre d'un grand nombre de péchés. » Après ces mots : « Vient d'un seul, » il faut sous-entendre « péché, » comme le prouve ce qui suit : « La grâce délivre d'un grand nombre de péchés. » Cette différence consiste donc précisément en ce qu'une seule faute a été condamnée en Adam, au lieu qu'une multitude ont été pardonnées par Notre-Seigneur. La suite se rapporte encore â ces deux différences, que saint Paul continue à expliquer de cette manière : « Et si, à cause du péché d'un seul, la mort a régné par un seul ; à plus forte raison ceux qui reçoivent l’abondance de la grâce et de la justice, règneront-ils dans la vie par un seul, Jésus-Christ. » Donc ces mots: « A plus forte raison règneront-ils, » se rapportent à la vie éternelle; mais ces autres : « Ceux qui reçoivent l'abondance de la grâce, » se rapportent au pardon d'une multitude de péchés. Ces différences une fois expliquées, l'auteur sacré revient à son sujet un instant interrompu et qu'il avait commencé ainsi: « Car, de même que le péché est entré dans le monde par un seul homme, et la mort par le péché 3 ; » il reprend donc: « Comme c'est par le péché d'un seul que tous les hommes sont tombés sous l'arrêt de la condamnation ; « ainsi c'est par la justification d'un seul que tous les hommes recevront la justification de la vie. « Car, de même que par la désobéissance d'un seul homme beaucoup ont été constitués pécheurs ; ainsi, par l'obéissance d'un seul beaucoup seront constitués justes. » Voilà bien le type du futur Adam, dont il avait commencé à parler plus haut, et auquel, après une interruption destinée à signaler certaines différences entre les deux Adam, il revient par cette conclusion : « Comme c'est parle péché d'un seul que tous les hommes, » etc .
