73.
Peut-être ne comprends-tu pas ceci, et doutes-tu de la vérité de mes paroles? Regarde au moins si tu n'es pas sûr de ton doute; et si tu en es certain, cherche ce qui te donne cette certitude. Non assurément , tu n'auras pas pour te guider les rayons du soleil , mais la lumière véritable qui éclaire tout homme venant en ce monde1. Elle ne se montre point aux yeux du corps, ni aux regards arrêtés sur les vains fantômes que ces mêmes yeux leur ont apportés; mais elle apparaît à ceux qui savent dire à ces imaginations : Ce n'est point vous que je cherche, et ce n'est point par vous que je vous juge; je condamne ce que je trouve en vous de difforme, et j'agrée les beautés que j'y rencontre. Car ce qui dirige en moi le blâme et la louange surpasse encore ces beautés. Aussi je le préfère non-seulement à votre beauté, mais aussi à tous les corps où je vous ai puisées.
As-tu compris cette règle? tu peux ainsi la formuler: celui qui connaît son doute, connaît une chose vraie : or il est certain de ce qu'il connaît, donc il est certain de ce qui est vrai, et en doutant de la vérité , il trouve en lui ce qui doit mettre fin à son doute. Mais rien n'est vrai que par la vérité : il ne doit donc point douter de la vérité, s'il peut douter de quoi que ce soit. De plus, comprendre ceci , c'est voir par cette lumière qui ne brille ni dans le temps ni dans l'espace, ni au milieu des images que le temps et l'espace peuvent fournir. Et ces vérités pourraient-elles s'altérer, quand même le raisonnement serait anéanti, ou irait se perdre dans les grossières conceptions des hommes charnels? Car le raisonnement n'a point créé ces vérités, il les a constatées. Donc avant d'être découvertes, elles existent, et c'est pour nous renouveler qu'elles se manifestent à nous.
Jean, I, 9. ↩
