74.
Ainsi l'homme intérieur renaît à une nouvelle vie et chaque jour se détruit l'homme extérieur1. Le premier considère celui-ci, et en le comparant à soi, il le trouve difforme; mais considéré en son rang l'homme extérieur est beau; il aime dans les corps la convenance, et corrompt ce qu'il s'approprie, c'est-à-dire ce qui l'alimente. Ces aliments se corrompent en ce sens qu'ils perdent leur nature pour entrer dans la composition de nos différents organes, y renouveler ce qui est usé, et y prendre une forme nouvelle et convenable. L'action vitale les juge en quelque sorte : les uns donc servent à former cette beauté visible, ceux qui n'y sont point propres s'échappent comme superflus. Et parmi ces derniers, les uns plus grossiers retournent à la terre pour revêtir des formes nouvelles; d'autres s'exhalent de tous les pores; d'autres enfin pénètrent dans les organes les plus secrets de tout l'être vivant pour le rendre capable de se reproduire, et provoqués par l'union des sexes, ou seulement par l'image de cette union, ils descendent du sommet de la vie au milieu des voluptés grossières. Dans le sein maternel et durant des temps déterminés, ils se rendent à la place désignée , pour former chaque membre dans chaque partie du corps; et si l'harmonie n'a point été violée, la lumière ajoute son coloris, il naît un enfant que l'on dit beau et dont la vue excite le plus ardent amour dans ceux qui s'y attachent. Ce charme pourtant est moins le produit de la forme vivante, que de la vie elle-même; car si cet être vivant nous aime, il a pour nous des attraits plus séduisants : s'il nous hait, sa vue nous irrite, nous est insupportable, quand même sa beauté charmerait les regards. Telle est le domaine de la volupté charnelle : telle est l'infime beauté. Elle est soumise à la corruption, sans quoi on en prendrait une trop haute idée.
II Cor. IV, 16. ↩
