CHAPITRE XXV. FAUSSE INTERPRÉTATION DE CES PAROLES: RIEN N'A ÉTÉ FAIT SANS LUI.
Que penser de l'extravagance de certains hérétiques qui veulent que le mot rien signifie quelque chose dans le sens positif, et en donnent pour raison que ce mot a été placé à la fin de la phrase? Quelque chose a été fait, disent-ils, et puisque quelque chose a été fait, le mot rien signifie ce quelque chose. Assurément le besoin de contredire leur a fait perdre le sens commun; aussi ne peuvent-ils pas comprendre que cette proposition: « Sans lui il n'a été fait rien», est identiquement la même que celle-ci: « Sans lui rien n'a été fait ». Prenons une autre forme, en donnant au mot rien un sens positif, remplaçons-le par le mot maison; nous aurons alors: Sans lui fut faite la maison, ou, ce qui revient au même. Sans lui la maison fut faite. Laissons maintenant au mot rien son sens naturel de néant, et nous retrouvons l'identité de ces deux propositions : Sans lui rien n'a été fait; sans lui il n'a été fait rien. Supposé qu'on demande à quelqu'un: Qu'avez-vous fait, et qu'il réponde: Rien; que penserait-on d'un calomniateur qui lui dirait: Vous avez donc fait quelque chose, car le mot rien signifie quelque chose? Mais nous trouvons le Sauveur lui-même se servant de la même expression à la fin d'une phrase: « Et je n'ai jamais rien dit secrètement1 »; qu'ils lisent donc et se renferment dans un profond silence.
Jean, XVIII, 20. ↩
