CHAPITRE XLIV. TURPITUDES INCROYABLES IMAGINÉES EN DIEU PAR MANÈS.
Nous savons qu'ils enseignent que la partie de la nature de Dieu a été mêlée au ciel, à la terre, aux choses souterraines, corporelles, sèches et humides, à toutes les chairs, à toutes les semences d'arbres, d'herbes, d'hommes et d'animaux. Nous catholiques nous enseignons que Dieu est présent partout et en tout par sa puissance divine, pour tout administrer et tout gouverner seulement nous le croyons évidemment dégagé de toute union substantielle avec les choses créées, à plus forte raison, nous déclarons qu'il n'en reçoit aucune souillure, aucune tache, aucune corruption. Pour eux, au contraire, la substance divine a été enchaînée, opprimée, souillée, et elle obtient sa délivrance, sa liberté, sa purification, non-seulement par la course du soleil et de la lune et par les forces de la lumière, mais aussi par ses élus. De semblables erreurs, de telles turpitudes aussi sacrilèges qu'incroyables, loin d'être acceptées, ne peuvent être décrites et répétées sans soulever une horreur profonde. Comment parler sans frémir de ces forces de la lumière, successivement transformées en figures d'hommes superbes et de femmes ravissantes opposées les unes aux autres; de cette vie, de ce contact résulte l'affreux bouillonnement de toutes les passions, de la plus grossière concupiscence. De ce foyer incandescent la nature de Dieu s'écoule et s'échappe par la génération, c'est cette délivrance qui constitue sa purification, purification plus honteuse assurément que la souillure elle-même1. Croira-t-on jamais, non-seulement qu'il en soit ainsi, mais que de telles horreurs puissent être écrites et répétées ! Et ces Manichéens, qui craignent de lancer l'anathème à Manès et à sa doctrine, n'hésitent pas à croire en Dieu des actions aussi repoussantes, des oeuvres aussi criminelles !
Et cependant de telles abominations, décrites avec complaisance, se lisent dans le livre septième du Trésor, car c'est de ce titre qu'ils décorent l'écrit de Manès où il a consigné tous ces blasphèmes d'impureté et d'audace. Nous renonçons à présenter à nos lecteurs le texte même que nous venons d'analyser, le coeur se soulève de dégoût et d'indignation devant de telles impudicités commises par la nature même de Dieu. ↩
