CHAPITRE XXII. LA VRAIE CONNAISSANCE DE DIEU. — LES PÉCHEURS CONVERTIS DOIVENT SEULS COMPTER SUR L'INDULGENCE : LES IMPÉNITENTS EN SONT INDIGNES.
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C'est donc en vain qu'un esprit léger s'imagine connaître Dieu, quand il le confesse avec une foi morte, je veux dire, sans les bonnes oeuvres, à la manière des démons, et qu'il se flatte d'arriver à la vie éternelle, en s'appuyant sur ce passage : « La vie éternelle consiste à vous con« naître, vous qui êtes le seul Dieu véritable et Jésus-Christ que vous avez envoyé 1. » On devrait en effet se rappeler cet autre passage: « Nous sommes assurés que nous le connaissons, si nous observons ses commandements. Celui qui dit qu'il le connaît et qui n'observe pas ses commandements, est un menteur et la vérité n'est point en lui 2. » Croirait-on que ces commandements n'ont rapport qu'à la foi ? Bien que personne n'ait osé soutenir cette opinion, l'expression de commandements empêche l'esprit de songer à une foule d'autres préceptes en lui rappelant les deux commandements qui résument la loi et les prophètes . Bien qu'on puisse dire avec raison que les commandements de Dieu se rattachent à la foi, si l'on entend par là, non la foi morte, mais la foi vivante qui agit par la charité, touefois Jean a lui-même expliqué ailleurs sa pensée en disant: « Voici son commandement, croire au nom de Jésus-Christ et nous aimer les uns les autres 3. »
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Le bienfait que nous vaut la grâce de croire sincèrement en Dieu, d'honorer Dieu, de connaître Dieu, c'est d'obtenir , son assistance pour bien vivre, sa miséricorde, si nous avons péché; et,nous obtenons cette faveur, non en persévérant avec indifférence dans les désordres qu'il condamne, mais en y renonçant. « Seigneur, ai-je dit, ayez pitié de moi ; guérissez mon âme, « parce que j'ai péché contre vous 4. » Or, on ne ,sait à quel être adresser ce langage, si on ne croit pas en Dieu, et on le tient inutilement, si on est éloigné de lui,pour n'avoir aucune part à la grâce da Médiateur. De là cette parole tirée du livre de la Sagesse, et entendue, je ne sais comment, par les gens qui s'endorment dans une.fausse sécurité . « Eussions-nous péché, nous vous appartenons. » Car, si notre Dieu- est assez bon et assez puissant pour avoir le désir et le pouvoir de guérir le péché accompagné du repentir, il ne pousse pas la faiblesse jusqu'à craindre, de pendre ceux qui s'endurcissent dans leur crime. Aussi le Sage après avoir dit : « Nous vous appartenons, » ajoute-t-il: « Nous qui connais sons votre puissance » puissance infinie dont le pécheur ne peut éviter ni les coups ni les regards. Et il conclut : « Nous ne pécherons plus en nous rappelant que nous vous appartenons 5. » Pourrait-on en effet concevoir dans toute sa beauté le séjour que doivent habiter avec Dieu tous ceux qui y sont prédestinés d'après les conseils éternels, sans s'efforcer de mener une vie digne de cette demeure céleste lorsque Jean s'exprime ainsi : « Je vous ai écrit ces choses pour que vous ne péchiez plus cependant si quelqu'un pèche, nous avons, auprès du Père, Jésus-Christ, le juste par excellence : c'est lui qui intercède pour nos péchés 6, » veut-il que nous péchions sans crainte ? Non; il veut que, renonçant aux péchés que nous avons pu commettre, nous ayons confiance dans l'avocat qui manque aux infidèles, pour ne point désespérer de la miséricorde divine.
