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Il ne faut pas nous étonner que la lumière brille dans les ténèbres, et que les ténèbres ne la comprennent pas1. Sur les lèvres de saint Jean, la lumière dit : « Voyez quelle charité le Père nous a donnée, jusqu'à nous accorder le nom et la qualité d'enfants de Dieu2 ». Et sur les lèvres des Pélagiens, les ténèbres s'écrient : La charité que nous possédons ne vient que de nous. S'ils avaient la véritable charité, c'est-à-dire la charité chrétienne, ils sauraient de quelle source unique elle peut leur venir. Il le savait bien, cet Apôtre qui disait : « Nous n'avons pas reçu l'esprit de ce monde, mais l'esprit qui vient de Dieu, afin que nous sachions quels sont les bienfaits que Dieu, nous accorde3». Saint Jean nous dit : « Dieu est charité4 ». Quant aux Pélagiens, ils prétendent posséder Dieu lui-même, non pas en vertu d'un don spécial de Dieu lui-même, mais parleur propre puissance; et tout en avouant que la science de la loi nous est venue de Dieu, ils veulent ne tenir que d'eux-mêmes la charité. Ils n'entendent donc pas cette parole de l'Apôtre : « La science enfle, mais la charité édifie5 ». Quoi de plus inepte, de plus insensé et de plus éloigné de la sainteté même de la charité, que de rapporter à Dieu cette science qui enfle quand elle n'est pas unie à la charité, tandis que nous tiendrions exclusivement de nous-mêmes cette charité qui empêche la science de tomber dans l'enflure de l'orgueil ? L'Apôtre a dit de « la charité de Jésus-Christ, qu'elle surpasse toute science6 »; se peut-il donc que l'on attribue à Dieu cette science qui doit se soumettre à la charité, tandis que les hommes ne devraient qu'à eux-mêmes cette charité qui surpasse toute science? La foi véritable et la saine doctrine viennent de Dieu, selon cette parole : « C'est de sa face que découlent la science et l'intelligence7»; il est également écrit : « La charité vient de Dieu8 ». Nous lisons : « L'esprit de science et de piété9»; nous lisons aussi : « L'esprit de vertu, de charité et de continence10 ». Mais la charité est un don plus précieux que la science, car la science dans l'homme, pour ne point s'enfler d'orgueil, a besoin de la charité ; tandis que « la charité n'est point jalouse, n'agit point témérairement et ne s'enfle pas11 ».
