19.
Après cette exposition de ses principes, l'Apôtre se tourne avec indignation vers ceux qui, gonflés de cet orgueil dont j'ai parlé plus haut et s'élevant follement en eux-mêmes jusqu'à se priver de tout appui, vont se briser honteusement contre les pierres dont ils se sont fait des idoles. Il venait d'exalter la piété de la foi; qui nous presse de rendre à Dieu des actions de grâces abondantes pour la justification qu'il veut bien nous accorder; se plaçant aussitôt en face da vice contraire, il s'écrie: « L'Evangile nous révèle également la colère divine qui éclatera du ciel contre l'impiété et l'injustice de ces hommes qui retiennent la vérité de Dieu dans l'injustice, parce qu'ils ont connu ce qui peut se découvrir de Dieu, Dieu même le leur ayant fait connaître. En effet, les perfections invisibles de Dieu sont devenues visibles depuis la création du monde, par la connaissance que ces créatures nous en donnent , en sorte qu'ils sont inexcusables, puisqu'ayant connu Dieu, ils ne l'ont point glorifié comme Dieu, et ils ne.lui ont point rendu grâces, mais ils se sont égarés dans leurs vains raisonnements, et leur coeur insensé a été rempli de ténèbres. Ainsi ils sont devenus fous en s'attribuant le nom de sages, et l'honneur qui n'est dû qu'au Dieu incorruptible ils l'ont transféré à l'image d'un homme corruptible, à des figures d'oiseaux; de bêtes à quatre pieds et de reptiles1 ».
Remarquez que l'Apôtre ne dit pas de ces hommes qu'ils ignorent la vérité, mais qu'ils retiennent la vérité dans l'injustice. Or, comme on serait tenté de demander à quelle source ces hommes avaient puisé la vérité, puisque Dieu ne leur avait pas donné la loi, l'Apôtre prévient la question et répond que c'est par les choses visibles qu'ils ont pu connaître les choses invisibles du Créateur. C'est en s'appliquant à cette recherche que de grands esprits sont parvenus à avoir de Dieu une connaissance naturelle suffisante. Mais voici leur impiété. « Après avoir connu Dieu, ils ne l'ont pas glorifié comme Dieu, ils ne lui ont point rendu grâces, et ils se sont évanouis dans leurs pensées ». L'orgueil, telle est donc la maladie de ceux qui se trompent eux-mêmes en se croyant quelque chose, tandis qu'ils ne sont rien2. Ils se sont aveuglés dans ce gonflement de l'orgueil, contre lequel le Psalmiste protestait de toute son âme quand il s'écriait: «. Nous verrons la lumière dans votre splendeur3 » ; car pour eux, ils se sont détournés de la lumière de l'immuable vérité « et leur coeur insensé s'est enveloppé des plus épaisses ténèbres». Quoiqu'ils eussent connu le Seigneur, leur coeur n'était pas sage, et ils ont fait preuve d'une véritable folie, puisqu'ils n'ont pas glorifié Dieu et ne lui ont pas rendu grâces. Le Seigneur avait dit à l'homme : « La piété, telle est la véritable sagesse » ; mais ces hommes ont répondu « en disant qu'ils étaient sages », ce qui signifie en réalité qu'en s'attribuant à eux-mêmes les biens qu'ils possédaient, « ils sont devenus insensés ».
