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« La loi », dit l'Apôtre, « a été établie pour faire connaître la prévarication1 »; voilà pourquoi cette lettre écrite hors de l'homme, il l'appelle le ministère de la mort et de la condamnation ; car nous accomplissons la justice par le don de l'Esprit, et par là nous sommes délivrés de la condamnation que nous avions encourue par la prévarication. La lettre disparaît donc, mais l'esprit demeure; car la lettre, ce pédagogue redoutable, disparaîtra lorsque la charité aura succédé à la crainte. En effet, « là où est l'Esprit du Seigneur, là se trouve la liberté ». D'un autre côté, nous devons cet heureux état, non point à nos propres mérites, mais à la miséricorde divine; de là cette parole: « C'est pour. quoi, ayant reçu un tel ministère, selon la miséricorde qui nous a été faite, nous ne perdons point courage. Mais nous rejetons loin de nous les passions qui se cachent comme étant honteuses, ne nous conduisant point avec artifice, et n'altérant point la parole de Dieu par la ruse et la fraude ». Sous ces noms d'artifice et de ruse, l'Apôtre désigne l'hypocrisie qui pousse les orgueilleux à vouloir passer pour justes. Pour faire mieux encore ressortir le caractère de la grâce, l'Apôtre s'empare de cette pensée du Psalmiste: « Bienheureux », dit-il, « celui à qui Dieu n'a point imputé le péché, et dont les lèvres ne connaissent ni la ruse, ni l'artifice2 ».
Tel est le sentiment qui anime les saints, à qui l'humilité ne permet pas de se faire passer pour ce qu'ils ne sont pas. Un peu plus loin, l'Apôtre ajoute: « Car nous ne nous prêchons pas nous-mêmes, mais nous prêchons Jésus Christ, Notre-Seigneur, et nous nous regardons comme vos serviteurs par Jésus-Christ, parce que le même Dieu qui a commandé que la lumière sortît des ténèbres, a fait luire sa clarté dans nos coeurs, afin que nous puissions éclairer les autres et leur donner connaissance de la gloire de Dieu, selon qu'elle paraît en Jésus-Christ ». Telle est donc la science de la gloire de Dieu, par laquelle nous savons qu'il est la lumière, et que c'est par cette lumière qu'il dissipe nos ténèbres.Il insiste sur cette pensée en disant: «Nous portons ce trésor dans des vases de terre ; afin que l'on reconnaisse que la grandeur de la puissance qui est en nous est de Dieu, et non pas de nous ». Plus loin encore, et toujours pour exalter la grâce que nous trouvons en abondance dans la personne de Notre-Seigneur Jésus-Christ, il arrive à parler du vêtement de la justice de la foi, dont nous devons être trouvés couverts pour ne pas rester nus; car tant que nous sommes dans ce corps, nous gémissons sous sa pesanteur, appelant de nos voeux l'heureux jour où nous serons revêtus du vêtement qui nous vient du ciel, afin que ce qu'il y a de mortel en nous soit absorbé par la vie. C'est alors qu'il s'écrie : « C'est Dieu même qui nous a formés pour cet état et qui nous a donné pour gage son Esprit ». Enfin, il ajoute : «Afin qu'en lui nous devenions justes de sa justice3 ». Telle est donc cette justice de Dieu, non pas celle qui est essentielle à sa nature, mais celle dont il nous revêt et nous gratifie.
