38.
Constantin employait les revenus publics en présents qu’il faisait mal à propos à des personnes indignes et inutiles à l’empire. Il surchargeait ceux qui tâchaient de subvenir même au-delà de leurs forces aux nécessités de l’état, et enrichissait des hommes incapables de servir. Il prenait la prodigalité pour une magnificence. Il imposa un tribut en or et en argent à tous ceux qui négocient en quelque lieu de la terre que ce puisse être, à ceux qui font le trafic le plus bas et le plus méprisable dans les villes, et il ne voulut pas même que les femmes débauchées, dont la misère est égale à l’infamie, fussent exemples de cette charge. Lorsque la quatrième année en laquelle on devait payer ce tribut approchait on n’entendait par toutes les villes que des gémissements et des plaintes. Ceux qui ne pouvaient payer, à cause de leur extrême pauvreté, étaient tourmentés par les plus cruels supplices. Les mères étaient contraintes de vendre leurs fils et les pères de prostituer leurs filles, pour trouver de l’or et de l’argent à ces impitoyables exacteurs. Comme il ne voulait pas qu’aucun de ceux qui sont dans une fortune éclatante manquât de sujet de tristesse, il les éleva tour à tour à la charge de préteur sous prétexte de les honorer, mais en effet à dessein de tirer d’eux de grandes sommes d’argent. Lorsque ceux qui élisaient à cette charge arrivaient dans les villes, les principaux citoyens s’en retiraient de peur d’être revêtus d’une dignité qui serait la ruine de leur famille. Il avait un état des biens de toutes les personnes de qualité pour leur imposer un tribut qu’il appela Follis. Ces impositions ont dépeuplé la plupart des villes, car, ayant été levées sous le règne des empereurs suivants, elles ont tellement épuisé les principales familles, qu’elles ont été obligées d’abandonner leurs maisons.
