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Alors tous les principaux chefs assemblèrent l’armée, pour décider entre les mains de qui l’on remettrait le souverain pouvoir; parce qu’un chef suprême était nécessaire pour préserver des périls dont on était environné dans un pays ennemi. Jovien, fils de Varronien, tribun des domestiques fut élu. Voilà un récit fidèle de tout ce qui arriva jusqu’à la mort de Julien.
Jovien ayant pris la robe impériale et le diadème, partit pour s’en retourner. Lorsqu’il fut proche du fort de Suma, les Perses fondirent, avec leurs chevaux et avec quelques éléphants, sur l’aile droite de son armée où étaient les joviens et les herculiens, qui sont des compagnies établies autrefois par Dioclétien et par Maximien, dont l’un avait pris le surnom de Jupiter, et l’autre celui d’Hercule, et les incommodèrent notablement. N’ayant pu soutenir les efforts des éléphants, ils prirent la fuite. Les Perses les poursuivirent jusqu’à un endroit un peu raide où étaient nos goujats qui, n’ayant pas voulu drus-urne Inutiles, tirèrent de haut en bas, et blessèrent des éléphants qui effarouchèrent les chevaux en fuyant et en criant, de sorte que plusieurs de ces éléphants furent tués par les soldats, et que plusieurs soldats demeurèrent sur la place en combattant. Julien, Maximilien et Macrobe moururent en faisant leur devoir. Ceux qui visitaient les corps des morts trouvèrent celui d’Anatolius, auquel ils rendirent le devoir de la sépulture de la manière que le temps le pouvait permettre, pressés qu’ils étaient par les ennemis. Ils marchèrent quatre jours, durant lesquels ils furent continuellement incommodés par les Perses qui les harcelaient quand ils les voulaient marcher, et qui s’enfuyaient quand ils les voyaient se retourner pour venir sur eux à la charge. Lorsqu’ils furent dans un pays plus étendu que celui où ils avaient passé auparavant, ils se résolurent de traverser le Tigre. Pour cet effet ils lièrent plusieurs outres ensemble, et les soldats passèrent dessus les premiers, et après eux les capitaines et les autres chefs. Ce passage ne les mit pas en sûreté: car outre la disette dont ils étaient pressés, les Perses accouraient encore sur eux de toutes parts.
