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Les confessions de Saint Augustin
CHAPITRE XXXI DE LA VOLUPTÉ DANS LES ALIMENTS.
43. Le jour me suggère un autre ennemi; et plût à Dieu qu’il pût lui suffire! Nous réparons, par le boire et le manger, les ruines journalières du corps, jusqu’au moment où, détruisant l’aliment et l’estomac, vous éteindrez mon indigence par une admirable plénitude, et revêtirez cette chair corruptible d’une éternelle incorruptibilité (I Cor. XV, 53). Aujourd’hui toutefois, cette nécessité m’est douce, et je combats cette douceur pour ne pas m’y laisser prendre: guerre de tous les instants que je me fais par le jeûne, et les rigueurs qui réduisent le corps en servitude (Cor. IX, 27); et pourtant je ne puis éviter le plaisir qui chasse les douleurs du besoin: car la faim et la soif sont aussi des douleurs, brûlantes et meurtrières comme la fièvre, si les aliments ne les soulagent; et votre bonté consolante mettant à la disposition de-nôtre misère les tributs du ciel, de la terre et des eaux, nos angoisses deviennent des délices.
44. Vous n’avez enseigné à ne prendre les aliments que comme des remèdes. Mais quand je passe de l’inquiétude du besoin au repos qui eh suit la satisfaction, le piége de la concupiscence m’attend au, passage; car ce passage lui-même est un plaisir; et il n’est pas d’autre voie, et c’est la nécessité qui m’y pousse. L’entretien de la vie est la seule raison du boire et du manger, et néanmoins un dangereux plaisir marche de compagnie; esclave qui trop souvent cherche à devancer son maître, revendiquant pour lui-même ce que je prétends n’accorder qu’à l’intérêt légitime. Et puis, les limites de l’un ne sont pas celles de l’autre; ce qui suffit à la nécessité ne suffit pas au plaisir; et parfois, il devient difficile de reconnaître si nous accordons un secours à la requête du besoin, ou un excès aux perfides sollicitations de la convoitise. Notre pauvre âme sourit à cette incertitude, charmée d’y trouver une excuse pour couvrir, du prétexte de la santé, une complaisance coupable. A ces tentations, je résiste chaque jour avec effort, et j’appelle à mon secours votre bras salutaire; et je vous remets toutes mes perplexités: car je n’ai pas encore sur ce point la stabilité du conseil.
45. J’entends la voix de mon Dieu: « Ne laissez pas appesantir vos coeurs par l’intempérance et l’ivrognerie (Luc, XXI, 34). » Ce dernier vice est loin de moi; votre miséricorde ne lui permettra jamais de m’approcher. Mais la sensualité s’insinue quelquefois chez votre serviteur. Que votre miséricorde la tienne éloignée de lui. Nul ne peut être continent, si vous ne lui en donnez la grâce. Vous accordez beaucoup à nos prières; le bien même que nous avons reçu avant de vous prier, c’est vous qui nous l’avez donné, c’est de vous que nous tenons encore de nous savoir redevables. Je n’ai jamais été sujet à l’intempérance, mais j’ai connu des intempérants que vous avez rendus sobres. Vous faites les uns ce qu’ils ont toujours été, les autres ce qu’ils n’ont pas été toujours, pour qu’ils sachent, les uns et les autres, à qui ils doivent rendre grâces.
Vous me dites encore: « Ne marche pas à la suite de tes convoitises, et détourne-toi de ta volonté (Ecclési. XVIII, 30).» Votre grâce m’a fait entendre cette autre parole que j’aime : « Que nous mangions, ou ne mangions pas, rien de plus pour nous, rien de moins ( I Cor. VIII, 8), » c’est-à-dire que je ne trouverai là ni mon opulence, ni ma détresse. Et cette parole encore : « J’ai appris à me contenter de l’état où je suis; je sais vivre dans l’abondance, et je sais souffrir le besoin. Je peux tout en celui qui me fortifie (Philipp. IV, 11-13). » Voilà comme parle un soldat du ciel; est-ce notre langage, poussière que nous sommes? Mais souvenez-vous, Seigneur, que nous sommes poussière; que c’est de poussière que vous avez fait cet homme, perdu et retrouvé (Ps. CII, 14 ; Gen. III, 19 ; Luc, XV, 24, 32.). Et ce n’est pas en lui qu’il a trouvé sa force, celui-là, poussière comme nous, qui darde au souffle de votre inspiration ces paroles brûlantes dans mon coeur : « Je peux tout en celui qui me fortifie. » Oh! fortifiez-moi, pour que je puisse ! Donnez-moi ce que vous m’ordonnez; et ordonnez-moi ce qu’il vous plaît. Et il confesse, lui, qu’il a tout reçu, et que toute sa gloire est dans le Seigneur (I Cor. I, 30, 31). Il veut recevoir aussi, cet autre, que j’entends vous adresser cette prière : « Délivrez-moi des désirs de la sensualité (Ecclés. XXIII, 6).» N’est-il pas évident, ô Dieu saint, que vous donnez tout, jusqu’à l’obéissance à vos commandements?
46. Vous m’avez enseigné, ô bon Père, « que tout est pur pour les coeurs purs; » mais que c’est un mal de se mettre à table au scandale de son frère (Rom. XIV, 20); que toutes vos créatures sont ( 465) bonnes; « qu’il ne faut rien refuser de ce que l’on peut recevoir en action de grâces (I Tim. IV, 4); »que ce n’est point « notre aliment qui nous rend recommandables à Dieu ( I Cor. VIII, 8), que l’on se garde de juger sur le manger et le boire ( Coloss. II, 16); que celui qui mange ne méprise pas celui qui s’abstient; que celui qui s’abstient ne méprise pas celui qui mange (Rom. XIV, 3). » Grâces à vous de tous ces enseignements que j’ai retenus; louanges à vous, mon Dieu, qui avez frappé à mon oreille pour introduire la lumière dans mon coeur. Délivrez-moi de toute tentation.
Non que je craigne l’impureté de l’aliment, je crains l’impureté de la convoitise. Je sais qu’il a été permis à Noé de se nourrir de toute chair (Gen. IX, 2,3); qu’Hélie a demandé à la chair l’apaisement de sa faim (III Rois, XVII, 6); que l’abstinence admirable de Jean n’a pas été souillée de sa pâture de sauterelles ( Matth. III, 4); je sais aussi qu’Esaü s’est laissé surprendre par un désir de lentilles (Gen. XXV, 34); que David s’est accusé lui-même d’avoir désiré un peu d’eau ( II Rois, XIII, 15-17); que notre Roi a été tenté, non de chair, mais de pain (Matth. IV, 3). Aussi le peuple, dans le désert, mérita-t-il d’être réprouvé, non pour avoir eu désir de la chair, mais parce que ce désir le fit murmurer contre le Seigneur (Nomb. XI).
47. Entouré de ces tentations, je lutte chaque jour contre la concupiscence du boire et du manger. Car ce n’est pas chose que je puisse me retrancher pour jamais, comme le désir de la femme. Il me faut donc tenir à ma bouche un frein qui se relâche et se retire à propos. Et, Seigneur, quel est celui qui ne s’emporte quelquefois au delà des barrières de la nécessité? S’il en est un, il est grand, qu’il vous glorifie de sa perfection! Moi, je ne suis pas cet homme ; je suis un pécheur, et je glorifie pourtant votre nom, assuré que Celui qui a vaincu le siècle (Jean, XVI, 33) intercède auprès de vous pour mes péchés ( Rom. VIII, 34), qu’il m’a compté entre les membres infirmes de son corps, dont vos yeux ne dédaignent pas les imperfections, et qui sont tous inscrits au livre de vie( Ps. CXXXVIII, 16).
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Bekenntnisse
31. Sein Verhalten gegenüber den Versuchungen von Hunger und Durst.
Noch eine andere „Plage“ führt jeder „Tag“ mit sich - o daß „ihm doch daran genügte!“ 1 Dem täglichen Verfall des Körpers begegnen wir durch Speise und Trank, bis du „Speise und Bauch zerstörst“2, meine Bedürfnisse durch wunderbare Sättigung ertötest und „dieses Verwesliche mit ewiger Unverweslichkeit“3 bekleidest. Jetzt aber ist mir dieses Bedürfnis süß und ich kämpfe wider diese Süßigkeit, um nicht von ihr gefesselt zu werden; täglich führe ich Krieg mit mir durch Fasten, und oftmals „zwinge ich meinen Leib ins Joch“4, und doch ist es mir eine Lust, die Schmerzen des Hungers zu verscheuchen. Denn Hunger und Durst sind ja Schmerzen, sie brennen und töten wie Fieber, wenn nicht die Arznei der Nahrung ihnen abhilft. Da uns nun diese zur Hand ist in deinen trostreichen Gaben, mit denen Erde, Wasser und Himmel unserer Schwachheit zu Hilfe kommen, so wird jene Mühsal noch zum Genuß.
Du hast mich gelehrt, die Speisen gleichwie Arznei zu mir zu nehmen. Aber in dem Augenblicke, da ich von der Beschwerde der Bedürftigkeit zur Ruhe der Sättigung übergehe, bedroht mich die Begierlichkeit mit ihren Fallstricken. Denn gerade dieser Übergang verursacht ein Lustgefühl, und doch gibt es keinen anderen Übergang zu dem, was unsere Natur gebieterisch verlangt. Während die Erhaltung der Gesundheit Zweck des Essens S. 249 und Trinkens ist, gesellt sich ihr gleichsam als Begleiter die gefährliche Lust; ja sie eilt ihr sogar meistens voran, so daß aus Lust geschieht, was ich nach meiner Behauptung und nach meinem Willen der Gesundheit wegen tue. In beiden Fällen kommt aber nicht das gleiche Maß zur Anwendung; denn was der Gesundheit genug ist, ist der Lust zu wenig, und oft ist es ungewiß, ob die notwendige Sorge für den Körper noch weitere Nahrung heischt oder ob täuschende Begier lüstern bedient sein will. Ob solcher Ungewißheit freut sich dann die unglückliche Seele und schafft sich eine Entschuldigung, froh darüber, daß es nicht genau feststeht, wieviel maßhaltende Sorge für die Gesundheit fordert, um so hinter dem Vorwand der Sorge für die Gesundheit das Treiben der Lust zu verhüllen. Solchen Versuchungen nun trachte ich täglich zu widerstehen; deine Rechte rufe ich deshalb zu meiner Rettung an und trage dir meine Beängstigungen vor, da ich mir in dieser Sache noch nicht recht im klaren bin.
Ich höre die Stimme meines Gottes, der da befiehlt „Beschweret eure Herzen nicht durch Völlerei und Trunkenheit“5. Trunksucht ist mir fern; du wirst mir auch weiter mit deiner Barmherzigkeit beistehen, daß sie mir nicht nahe. Unmäßigkeit dagegen im Essen überschleicht zuweilen deinen Diener; du aber wirst mir mit deiner Barmherzigkeit beistehen, daß sie sich weit von mir entfernt. Denn „niemand kann enthaltsam sein, außer du verleihest es“6. Vieles gibst du uns, wenn wir beten, und alles Gute, was wir empfangen haben, bevor wir beteten, haben wir von dir empfangen; und auch daß wir diesen Sachverhalt nachträglich erkennen, hast du gegeben. Trunksüchtig bin ich niemals gewesen; aber ich kenne Trunksüchtige, die durch dich nüchtern geworden sind. Dein Werk also ist es, daß jene es nicht sind, die es niemals waren, dein Werk, daß die es nicht immer geblieben, die es einmal waren, dein Werk schließlich, daß beide wissen, wessen Werk das ist. Noch ein anderes deiner Worte höre ich: „Gehe nicht S. 250 nach deiner Begierlichkeit und wende dich ab von deinem sündhaften Willen“7. Und durch deine Gnade vernahm ich auch jenes, das ich so sehr liebe: „Wenn wir essen, gewinnen wir nichts, wenn wir nicht essen, verlieren wir nichts“8, das heißt: jenes wird mich nicht reich und dieses mich nicht unglücklich machen. Und wieder vernahm ich: „Ich habe gelernt, mich mit dem, was ich habe, zu begnügen, ich weiß Überfluß zu haben und Mangel zu leiden. Ich vermag alles in dem, der mich stärkt“9. Siehe, so spricht ein Streiter des Herrn, nicht Staub, der wir sind. Aber gedenke, o Herr, „daß wir Staub sind“10; du hast ja aus Staub den Menschen erschaffen, und „er war verloren und ist wiedergefunden worden“11. Auch jener vermochte das nicht aus sich selbst, da auch er Staub war; dein Geist aber gab ihm die Worte ein, derentwegen ich ihn so sehr liebe: „Ich vermag alles in dem, der mich stärkt“. Stärke mich, daß ich es vermag; gib, was du befiehlst, und befiehl, was du willst. Jener bekennt, empfangen zu haben, und da „er sich rühmt, rühmt er sich im Herrn“12. Ich hörte auch, wie ein anderer bat, daß er empfange: „Nimm hinweg von mir die Begierlichkeit meines Bauches“13. Daraus erhellt, o mein heiliger Gott, daß du gibst, wenn geschieht, was du gebietest.
Du hast mich gelehrt, o gütiger Vater: „Den Reinen ist alles rein; aber verderblich ist es dem Menschen, wenn er durch sein Essen Anstoß gibt“14. Ferner: „Alles ist gut, was du geschaffen, und nichts verwerflich, was mit Danksagung genossen wird“15; desgleichen: „Die Speise gibt uns keinen Wert bei Gott“ und „Niemand soll uns richten wegen Speise und Trank“16 und schließlich: „Wer ißt, verachte nicht den, der nicht ißt, und wer nicht ißt, richte nicht den Essenden“17. So habe ich es gelernt, Dank dir, Preis dir, meinem Gotte, meinem Lehrer, der anklopft an mein Ohr und mein Herz erleuchtet: S. 251 entreiße du mich jeglicher Versuchung. Ich fürchte nicht die Unreinheit der Speise, sondern die Unreinheit der Begier. Ich weiß, daß dem Noe jede Art von Fleisch, die eßbar war, zu genießen erlaubt war, daß Elias durch Fleischnahrung gekräftigt, daß Johannes mit seiner wunderbaren Enthaltsamkeit von den Heuschrecken, die ihm zur Speise dienen mußten, nicht befleckt wurde; andererseits weiß ich, daß Esau durch seine Begierde nach Linsenmus betrogen wurde, David wegen seines heftigen Verlangens nach Wasser selber sich tadelte und unser König nicht mit Fleisch, sondern mit Brot versucht worden ist. Daher verdiente auch das Volk in der Wüste Strafe, nicht weil es nach Fleisch verlangte, sondern weil es aus Gier nach Fleisch wider den Herrn murrte.
Mitten in solche Versuchungen also hineingestellt, streite ich täglich gegen die Begier nach Speise und Trank. Denn hier kann ich nicht beschließen, was ich bloß einmal auszutilgen und dann nicht mehr anzurühren hätte, wie es wohl bei dem außerehelichen Verhältnisse möglich war. Daher muß ich die Zügel meines Gaumens bald maßvoll etwas nachlassen bald fester anziehen. Und wer ist's, o Herr, der sich nicht zuweilen um ein Kleines über die Grenzen der Mäßigkeit fortreißen ließe? Gibt es aber einen solchen, groß ist er, und er preise deinen Namen. Ich fürwahr bin es nicht; denn ich bin ein sündiger Mensch. Aber auch ich preise deinen Namen, und es „legt Fürsprache bei dir ein für meine Sünden“18, der „die Welt überwunden hat“19 und auch mich unter „die schwachen Glieder seines Leibes“20 zählt; denn auch „was unvollkommen ist an ihm, schauten seine Augen, und in deinem Buche werden alle aufgezeichnet werden“21.
Matth. 6,34. ↩
1 Kor. 6,13. ↩
1 Kor. 15,53. ↩
1 Kor. 9,27. ↩
Luk. 21,34. ↩
Weish. 8,21. ↩
Sir. 18,30. ↩
1 Kor. 8,8. ↩
Phil. 4,11 f. ↩
Ps. 102,14 u. Gen. 3,19. ↩
Luk. 15,24 und 32. ↩
1 Kor. 1,31. ↩
Sir. 23,6. ↩
Röm. 14,20. ↩
1 Tim. 4,4. ↩
Kol. 2,16. ↩
Röm. 14,3. ↩
Röm. 8,34. ↩
Joh. 16,33. ↩
1 Kor. 12,22. ↩
Ps. 138,16. ↩