3.
Que l’on prenne dans l’un ou dans l’autre sens cette expression: « Au commencement du livre », ce livre des psaumes, divisé en trois parties, de cinquante chacune, me paraît marquer de grands mystères, si l’on consulte bien chaque psaume cinquantième. Je ne saurais croire, en effet, que ce soit sans raison que le cinquantième soit tira psaume de pénitence; le centième, de la miséricorde et de la justice; le cent cinquantième, de la louange de Dieu dans ses saints. Tulle est ers effet la voie que nous suivons, pour arriver à la vie éternelle et bienheureuse : d’abord la condamnation de nos péchés, ensuite la vie pure, en sorte que nous méritions par cette vie pure, et par la condamnation de nos fautes, la vie éternelle. C’est en effet d’après un arrêt profond de sa justice et de sa bonté, que Dieu a appelé ceux qu’il avait prédestinés, que ceux qu’il a appelés, il les a justifiés, et que ceux qu’il a justifiés, il les a glorifiés1. Il est vrai, ce n’est point en nous-mêmes que s’est faite notre prédestination, mais eu lui-même et dans le secret de sa prescience. Pourtant, les trois autres faveurs, la vocation, la justification, et la vocation se font en nous. C’est la prédication de la pénitence qui nous appelle; car c’est ainsi que le Sauveur commence à prêcher son Evangile : « Faites pénitence, car le royaume des cieux est proche2 ». Nous sommes justifiés en invoquant la miséricorde, et en craignant le jugement; de là cette parole : « Seigneur, sauvez-moi en votre nom, et jugez-moi dans votre puissance3 ». Or, il ne craint point d’être jugé, celui qui a tout d’abord obtenu d’être sauvé. Notre vocation nous fait renoncer au diable par la pénitence, afin de ne plus demeurer sous son joug; après la justification, nous sommes guéris par la miséricorde, afin de ne plus craindre le jugement; et une fois glorifiés, nous passons àla vie éternelle, pour louer Dieu sans fin. C’est là ce que signifie, je crois, cette parole du Sauveur: « Voilà que je chasse les démons, et fais des guérisons aujourd’hui et demain, et au troisième jour je serai mis à mort4»; ce qu’il figura aussi dans les trois jours de sa passion, de son sommeil, et de son réveil. Car il fut crucifié, il fut enseveli, il ressuscita. Il triompha sur la croix des princes et des puissances, se reposa dans le sépulcre et s’élança à sa résurrection. De même la pénitence nous met à la croix, la justice au repos, la vie éternelle dans la gloire. La pénitence dit : « Ayez pitié de moi, mon Dieu, selon la grandeur de votre miséricorde, et selon la multitude de vos bontés, effacez mes iniquités5 ». Elle offre pour sacrifice à Dieu une âme brisée de douleur, un coeur contrit et humilié. C’est le Christ qui dit dans ses élus : « Seigneur, je chanterai votre miséricorde et votre jugement, je connaîtrai les voies de l’innocence quand vous viendrez à moi6 ». C’est la miséricorde, en effet, qui nous aide à faire les oeuvres de justice, afin d’arriver en toute sécurité au jugement, dans lequel seront bannis de la cité de Dieu ceux qui commettent l’iniquité7. Le verset qui termine le psaume que nous allons expliquer est le cri de la vie éternelle.
