CHAPITRE VI. PRIVILÉGE SPÉCIAL DE MARIE.
6. Ainsi Marie est l'unique femme dont on puisse dire qu'elle est tout à la fois mère et vierge, non-seulement d'esprit mais aussi de corps. Elle est mère spirituellement, non pas de Jésus-Christ, dont elle est elle-même la fille spirituelle, puisque tous ceux qui ont cru en lui, et Marie est du nombre, sont appelés les enfants de l'Époux1 ; mais des membres de Jésus-Christ, et c'est nous qui sommes ces membres. En effet, elle a coopéré, par sa charité, à faire naître dans l'Église les fidèles qui sont les membres de ce Chef. Elle est corporellement sa mère; car il fallait que, par un insigne miracle, notre Chef naquît d'une vierge, selon la chair, pour signifier par là que ses membres naîtraient spirituellement d'une autre vierge qui est l'Église. Marie seule est donc à la fois, selon l'esprit et selon la chair, mère et vierge, la mère et la vierge de Jésus-Christ. Dans la personne des saints, appelés à la possession du royaume de Dieu, l'Église tout entière est aussi spirituellement la mère et la vierge de Jésus-Christ ; dans quelques-uns des fidèles elle est, de corps, vierge de Jésus-Christ; dans d'autres elle est mère, mais non de Jésus-Christ. Quant aux femmes mariées et aux vierges consacrées à Dieu, si elles sont saintes de mœurs, si la charité vient en elles, d'un coeur pur, d'une bonne conscience et d'une foi sincère2, par cela même qu'elles accomplissent la volonté du Père, elles sont spirituellement mères de Jésus-Christ. Celles qui, dans la vie conjugale, enfantent corporellement, ce n'est pas Jésus-Christ, mais Adam qu'elles enfantent. De là leur empressement à procurer les sacrements3 à leurs enfants, pour les faire devenir membres de Jésus-Christ: elles savent à qui elles ont donné la vie.
