12.
Ne voyez-vous pas quels hommes me soutiennent pour supporter le poids de vos malédictions? Ne voyez-vous pas quels hommes font cause commune avec moi, et cette cause vous la calomniez avec un débordement inouï d'inepties et d'outrages? Ne voyez-vous pas que cet horrible crime dont vous accusez de tels évêques retombe sur vous de tout son poids; tandis que pour moi la plus pure de mes gloires c'est d'être accusé par vous, en compagnie de ces illustres Docteurs? Si vous le voyez, voyez-le, et alors du moins condamnez-vous au silence ; que toutes ces langues catholiques enchaînent la langue pélagienne; votre bouche criminelle soumettez-la à tant de bouches vénérables. Si, nouveau Polémon, après une débauche continuée jusqu'au jour, vous étiez entré dans la classe de Xénocrate, la honte que vous auriez éprouvée n'eût rien été en comparaison de celle que vous devriez ressentir dans l'assemblée de tant de saints illustres. Et, en effet, la honte ne devrait-elle pas être proportionnée au degré de véritable sagesse professée dans une école? De là je conclus que si Xénocrate, en sa qualité de disciple de Platon, méritait un tel respect, quel respect beaucoup plus grand ne méritent pas ces grands évêques en leur qualité de premiers disciples de Jésus-Christ leur divin Maître ! Je garde un précieux souvenir de Mémor, votre père, de bienheureuse mémoire; les belles-lettres nous avaient unis d'une étroite amitié qui vous avait rendu cher à mes yeux. Vous voyant apporter à l'étude, non pas l'ivresse d'une débauche nocturne, mais la turbulence d'un caractère violent, voulant vous calmer et vous guérir, je vous ai souvent conduit, non pas à l'école de quelque philosophe, mais dans l'assemblée majestueuse et pacifique de nos saints évêques. Pour toute récompense je vous demande cette faveur regardez-les comme ils vous regardent, écoutez-les vous adressant cette douce parole: Quoi donc, ô notre fils Julien, serions-nous des Manichéens? Dites-moi, je vous prie, que répondrez-vous? De quels yeux les regarderez-vous? Quels arguments leur opposerez-vous? A quelle catégorie d'Aristote aurez-vous recours pour lancer contre nous les foudres de votre colère? Oserez-vous dégainer en leur présence vos arguments, véritables épées de verre, véritables poignards de plomb? Leur sera-t-il difficile de faire voler vos armes en éclats et de vous réduire à une honteuse nudité? Ou bien, répondrez-vous que jamais le nom d'aucun d'entre eux n'a été flétri par vous de l'accusation de manichéisme? Mais alors que ferez-vous quand ils vous diront; Si vous n'aviez perfidement déchiré que notre nom, nous l'eussions encore souffert; mais pouvons-nous souffrir qu'on déchire notre foi, qui seule peut nous mériter de voir nos noms inscrits dans le ciel? Leur répondrez-vous; Je n'ai jamais souillé votre foi d'aucune accusation? Cette réponse serait-elle sincère de votre part, vous qui soutenez que c'est faire preuve de manichéisme de soutenir que les enfants à leur naissance contractent par Adam la souillure du péché originel? Or, ce dogme ils l'ont appris dans l'Eglise de Jésus-Christ avec les premiers éléments de la doctrine catholique ; ils l'ont enseigné dès qu'ils furent parvenus aux honneurs de l'Eglise ; à tous ceux qu'ils ont pu baptiser ils ont conféré par le Saint-Esprit la rémission de leurs péchés, et à ces nombreux enfants qu'ils baptisaient également, la rémission du péché originel. Je vous renouvelle donc mon avis, ma prière Contemplez ces nombreux et illustres défenseurs et docteurs de l'Eglise ; voyez à quels hommes vous adressez vos audacieuses et criminelles injures.
