40.
Vous plaît-il enfin de rétracter ces propositions qui favorisent si puissamment le manichéisme, quoique vous les ayez émises dans un but tout différent, et sans trop savoir ce que vous disiez? N'est-ce pas aux hommes créés par lui-même, que le Christ adressait ces paroles : «Ou bien rendez bons l'arbre et ses fruits, ou bien rendez mauvais l'arbre et ses fruits1 ». Or, comment expliquer ce langage, si le mal ne peut sortir d'une nature créée bonne, comme est l’homme; car à vos yeux l'arbre bon désigne l'oeuvre bonne de Dieu, telle que le mariage ou la nature? Vous ajoutez que le mal ne peut sortir d'une telle œuvre, parce que si nous disions que le mal naît du bien, nous démentirions cette parole du Sauveur : «Un bon arbre ne porte pas de mauvais fruits ». Ignorez-vous donc que les anges et le premier homme sont sortis directement des mains de Dieu, sans connaître d'autres ancêtres, et cependant ils sont devenus, non pas de mauvais fruits, mais des arbres mauvais d'où devaient sortir de mauvais fruits? Le Sauveur réfute donc à la fois, et la doctrine manichéenne, puisqu'un seul homme ou une seule nature a le pouvoir de rendre l'arbre bon ou mauvais; et votre propre doctrine, puisqu'un arbre mauvais peut devoir son existence à une nature bonne. Vous êtes donc manifestement dans l'erreur, quand vous émettez en faveur du manichéisme cette proposition : « Le mal ne peut sortir du bien » ; car on doit conclure implicitement que le mal ne peut sortir que de la nature du mal, ce qui vous jette en plein manichéisme.
Matt. XII, 33. ↩
