26.
Dites, Julien, dites sans hésiter qu'il ne peut être qu'un Manichéen, celui qui fait une telle injure à la nature dont vous soutenez l'innocence, celui qui affirme la transmission originelle de la condamnation primitive. Ou plutôt, s'il est encore quelque chance de vous guérir, réprimez les élans de votre esprit dévoyé, corrigez-vous et comprenez enfin dans quel sens l'évêque de Constantinople a pu dire que les enfants n'ont pas de péchés. Tout ce qu'il a voulu dire, c'est que ces enfants n'ont pas encore commis de péchés personnels, ce qui n'empêche pas qu'ils soient réellement souillés de la faute de nos premiers parents. Vous auriez pu vous convaincre que telle est réellement sa pensée, si vous aviez pris la peine de lire l'homélie tout entière; et si vous l'avez lue, je ne comprends plus que cette vérité ait pu vous échapper ; et si elle ne vous a pas échappé, je m'étonne qu'elle ne vous ait pas corrigé, à moins cependant que cet évêque ne soit d'aucune autorité. Si vous avez lu cette homélie, si vous avez compris et médité le passage que je vous ai cité, et si néanmoins vous avez cru devoir persévérer dans votre opinion, pourquoi donc avez-vous pris la peine d'insérer quelques-unes de ses paroles dans votre ouvrage? Etait-ce pour nous inviter à lire l'homélie tout entière, afin de mieux saisir et de mieux remarquer les embûches que vous vouliez nous dresser? En effet, quoi de plus clair que ces paroles : «Jésus-Christ est venu et nous a trouvés liés par les obligations paternelles, écrites et signées par Adam. C'est de lui que nous viennent ces obligations, mais elles ont encore été accrues par nos propres péchés1 ».
Voyez-vous avec quel soin cet évêque, si instruit de la foi catholique, distingue l'obligation paternelle, qui est devenue pour nous héréditaire, de ces dettes que nous contractons par nos péchés personnels? Voyez-vous ce que le baptême efface dans les enfants qui n'ont pas encore contracté de dettes personnelles, ce qui ne les empêchait pas d'être liés par le contrat paternel? En traduisant mot à mot le texte précité, nous comprendrons mieux encore la pensée du saint docteur : « Jésus-Christ est venu une fois, et il a trouvé notre chirographe paternel écrit par Adam. C'est Adam qui a posé le principe de la dette, mais nous l'avons accrue par nos péchés subséquents ». Il ne se serait pas contenté de dire : « le chirographe paternel », sans ajouter qu'il est « nôtre ». C'était pour nous faire comprendre qu'avant même d'avoir augmenté notre dette par nos péchés subséquents, nous avions déjà contracté celle de ce chirographe paternel.
S. chrys. Homélie aux Néophytes. ↩
