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Dans un autre de ses sermons l'évêque de Constantinople demande pourquoi les bêtes sauvages s'attaquent à l'homme, et quelquefois le tuent, malgré la sentence dans laquelle le Seigneur déclare formellement qu'il les soumet à l'homme, afin qu'il ait sur elles un empire souverain1 . Il répond aussitôt qu'avant le péché tous les animaux étaient soumis à l'homme, et si maintenant ils nuisent à l'homme, c'est en punition du premier péché. Le saint docteur se livre sur ce sujet à de longs développements que je ne saurais reproduire ici; cependant, j'en citerai quelques passages. «Les bêtes sauvages », dit-il, «nous frappent de frayeur et de crainte; j'en conviens. Nous avons perdu notre empire sur elles; j'en conviens également. Mais cela ne prouve pas que la loi de Dieu soit menteuse ; car il n'en était point ainsi dès le commencement; alors l'homme était le maître des animaux, ils le craignaient, tremblaient devant lui et lui obéissaient. Mais parce que nous ne sommes pas restés fidèles à Dieu, nous avons été dépouillés de nos honneurs primitifs. En voulons-nous la preuve? Le Seigneur réunit les animaux en sa présence, afin qu'il vît comment il devait les nommer, et Adam ne fut saisi a d'aucune crainte et ne recula pas ». Un peu plus loin le saint évêque ajoute : «Cela seul nous prouve que, dans le principe, les a animaux n'inspiraient aucune crainte à l'homme ; mais nous en avons une seconde preuve bien plus frappante encore dans la conversation engagée par la femme avec le serpent. Si les hommes avaient tremblé à la vue des animaux, la femme serait-elle restée en présence du serpent? Bien loin de recevoir ses conseils, et d'entretenir avec lui une longue et tranquille conversation, elle eût été promptement saisie d'effroi et aurait pris la fuite; mais non; elle discute et n'éprouve aucune crainte. Cette frayeur que nous éprouvons n'était donc point encore connue; mais depuis que le péché est entré dans le monde, nous sommes dépouillés des honneurs dont nous jouissions ». Le saint docteur continue : «Tant que l'homme resta fidèle à Dieu, il inspira de la terreur aux animaux ; mais parce qu'il a désobéi à Dieu, il tremble maintenant devant le dernier de ses compagnons d'infortune. S'il n'en est pas ainsi », dit-il, «prouvez-moi que, avant le péché, les animaux faisaient également trembler les hommes; vous ne le pourrez jamais. Et maintenant si la crainte a succédé au péché, c'est encore par un effet de la bienveillance a du Créateur. Car si, après avoir détruit et violé le précepte qui lui avait été solennellement imposé, l'homme avait conservé intacts les honneurs dont Dieu l'avait comblé, il lui eût été bien difficile de ressusciter2 ». Il est évident que par cette discussion saint Jean prouve que le péché, entré dans le monde par un seul homme, est devenu un péché commun à tous les hommes, puisque tous ont horreur des bêtes sauvages. Celles-ci n'épargnent pas davantage les enfants, qui cependant, selon le principe posé plus haut, devraient n'avoir rien à craindre des animaux, s'ils étaient absolument étrangers à toute transmission du péché originel.
