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« Alors tressailliront les bois des forêts devant la face du Seigneur, parce qu’il vient, parce qu’il vient pour juger la terre1 » . Il est venu une fois, et il doit revenir une seconde fois. Il est venu dans son Eglise, porté sur les nuées. Quelles sont les nuées qui l’ont porté? Les Apôtres qui l’ont annoncé, comme vous l’entendiez par la lecture de saint Paul : « Nous sommes les ambassadeurs du Christ», nous dit-il, « vous conjurant en sort nom de nous réconcilier à Dieu2». Telles sont les nuées sur lesquelles est venu le Christ, mais il doit venir une seconde fois pour juger les vivants et les morts. Il est donc venu une première fois sur les nuées. C’est de ce premier avènement que Jésus a dit dans l’Evangile : « Désormais vous verrez le Fils de l’homme venant sur les nuées3 ». Qu’est-ce à dire « désormais? » Le Seigneur ne viendra-t-il point lorsque toutes les tribus de la terre seront dans les pleurs? Il est venu dans ceux qui le prêchent, et il a rempli toute la terre. Ne résistons pas au premier avènement, afin de ne point redouter le second. Vous avez encore entendu dans l’Evangile : « Malheur aux femmes enceintes ou nourrices; soyez sur vos gardes, parce que vous ne savez quand viendra cette heure4 ». Tout cela est dit en figures. Quelles sont les femmes enceintes et les nourrices? Les femmes enceintes sont les âmes qui ont mis leur espérance dans cette vie; et celles qui ont déjà ce qu’elles espéraient sont désignées par les nourrices. Ainsi, tel homme veut acheter une maison de campagne; il ressemble à une femme enceinte; rien n’est fait encore, mais l’espérance est dans son sein ; il l’achète, et le voilà qui a enfanté, qui allaite ce qu’il a acheté. « Malheur aux femmes enceintes ou qui allaitent » : malheur à ceux qui mettent leur espérance dans cette vie, malheur à ceux qui s’attachent aux biens qu’ils ont acquis par leur espérance mondaine! Que doit donc faire un chrétien? User du monde, mais non servir le monde. Qu’est-ce à dire? C’est avoir comme s’il n’avait pas. Voici ce que dit saint Paul, ses exhortations à celui qu’il ne veut point laisser surprendre, comme les femmes enceintes ou nourrices, pour ce jour redoutable : « Du reste, mes frères, le temps est court, aussi faut-il que ceux qui ont des femmes soient comme s’ils n’en avaient point; ceux qui pleurent, comme s’ils ne pleuraient point; ceux qui se réjouissent, comme s’ils ne se réjouissaient pas; ceux qui achètent, comme s’ils ne possédaient pas; ceux qui usent des choses de ce monde, comme s’ils n’en usaient pas. Car la figure du monde passe; et je veux que vous soyez sans inquiétude5 ». L’homme sans inquiétude attend avec calme l’avènement de son Seigneur. Car, est-ce bien aimer Dieu, que craindre qu’il vienne? N’est-ce point une honte pour nous, mes frères? Nous l’aimons et nous craignons qu’il ne vienne? En vérité, l’aimons-nous? Ne lui préférons-nous pas nos péchés? Haïssons donc le péché, aimons Celui qui viendra les punir. Il viendra, bon gré, mal gré. Qu’il ne soit point venu encore, ce n’est pas une raison pour qu’il ne vienne point. Il viendra, et à l’heure que tu ignores; et s’il te trouve prêt, cette ignorance ne te nuira point. « Alors tressailliront tous les arbres des forêts devant la face du Seigneur, parce qu’il est déjà venu ». Et ensuite? « Parce qu’il vient pour juger la terre; tous les arbres des forêts seront dans l’allégresse ». Il est venu une fois, il viendra une seconde fois juger la terre, et il trouvera dans la joie ceux qui auront cru à soin premier avènement, « parce qu’il est venu ».
