27.
Vous concluez en ces termes votre longue discussion : «C'est donc avec raison que l'on attribue l'origine de la concupiscence au feu vital; dès qu'il s'allume, il doit nécessairement produire la concupiscence charnelle, car c'est sur lui que repose la vie charnelle ». A voir votre assurance, on dirait que vous pouvez prouver, ou du moins sans vouloir juger du degré de votre audace, que vous osez soupçonner que l'homme, tel qu'il avait été créé, avant toute faute de sa part, et pendant son séjour dans le paradis terrestre, ressentait déjà en lui-même cette concupiscence charnelle, et éprouvait, comme nous l'éprouvons nous-mêmes, ces luttes honteuses soulevées contre l'esprit par les sens en révolte. Vous ajoutez aussitôt : «Cet appétit charnel n'est une faute, ni dans son genre, ni dans son espèce, ni dans son mode, mais uniquement dans son excès. En effet, dans a son genre et dans son espèce, il est l'oeuvre directe du Créateur; dans son mode, il appartient au libre arbitre, tandis que dans ses excès il n'est plus qu'un vice de la volonté ». Quelle,douce jouissance ont dû vous procurer ces vaines paroles ! tant il est vrai que vous ne pensez pas ce que vous dites ! Si dans son mode cet appétit est soumis au libre arbitre de l'honnêteté; tout époux honnête est donc parfaitement libre de n'en éprouver les atteintes que quand il en est besoin ? Et cependant il ne peut pas toujours ce qu'il veut. De même un honnête continent sera libre, quand il le voudra, de soulever en lui-même les mouvements de cet appétit ? Et cependant il ne peut pas toujours ce qu'il veut. De là ce cri d'un homme : «Je trouve en moi la volonté de faire le bien, mais je ne trouve pas le moyen de l'accomplir1 ». Si donc votre volonté n'exerce à peu près aucun empire sur les mouvements de l'appétit sensuel; si dans ses effets cet appétit ne connaît pas la modération; et si enfin tout esprit honnête doit soutenir contre lui une lutte continuelle; que trouvez-vous encore à louer dans cette concupiscence, et pourquoi ne pas crier vers Dieu: «Délivrez-nous du mal2 ».
