56.
«A travers tous ces remparts qui protégeaient l'innocence », vous cherchez « une ouverture par laquelle le péché puisse pénétrer ». Ne voyez-vous donc pas l'apôtre saint Paul, vous montrant, non pas une fente, mais une porte tout au large ouverte, quand il s'écrie: «Le péché est entré dans le monde par un seul homme, et la mort par le péché ; et c'est a ainsi que le péché est entré dans tous les a hommes?» Vous gardez le silence sur ces paroles, afin de mieux faire retentir les vôtres : « L'oeuvre du démon », dites-vous, «ne saurait pénétrer dans l'œuvre de Dieu »; les hommes sont l'œuvre de Dieu, le péché est l'oeuvre du démon, et pourtant l'Apôtre affirme que le péché est passé dans tous les hommes. Vous vous écriez : «Si la nature nous vient de Dieu, elle est exempte de tout mal originel » ; pourquoi ne pas dire : Si la nature nous vient de Dieu, le mal ne peut venir d'elle, ni habiter en elle? Cette pensée serait plus religieuse encore, et cependant elle est une erreur, car le mal ne peut sortir que de la nature, et il ne peut habiter nulle part que dans la nature. Je proclame donc que je vois l'œuvre de Dieu dans l'enfant qui prend naissance, quoiqu'il soit souillé par le mal originel; car ce qui, dans cet enfant, est l'oeuvre de Dieu, jouit d'une bonté réelle ; l'œuvre de Dieu n'est-elle pas bonne, même avec le mal, non-seulement dans les enfants, mais encore à tous les âges? j'entends par là le sentiment, la substance, la forme, la vie, la raison, et tous les autres biens qui se trouvent dans l'homme mauvais. Quel est donc celui qui donne la vie à l'homme, si ce n'est celui en qui nous avons la vie, le mouvement et l'être1? Cette vie, il nous la donne par le travail mystérieux de sa munificence, en tenant compte des aliments visibles avec lesquels nous sustentons notre existence. Celui donc qui conserve la vie de l'homme, fût-il même pécheur, c'est également lui qui donne naissance à l'enfant, quoique cette naissance soit souillée par le péché.
Act. XVII, 28. ↩
