45.
J'en conclus que notre cause est finie. Libre à vous de louer la concupiscence de la chair; mais du moment que. vous combattez contre elle, vous prouvez que vous comprenez que c'est d'elle qu'il a été dit en toute vérité par l'apôtre saint Jean qu' « elle n'est pas du Père1 ». En effet, si, comme vous le dites, «celui qui n'en use pas modérément fait un mauvais usage de ce, qui est bon en soi », je suis en droit de conclure que cette concupiscence reste bonne, même dans ceux qui en abusent. Mais alors,. quelle est donc cette concupiscence qui n'est pas du Père? Est-ce celle que vous vous obstinez à louer ? Et si elle est mauvaise, où le sera-t-elle? quand le sera-t-elle? N'importe l'abus qu'on puisse en faire, toujours est-il qu'elle restera bonne en elle-même ; ce qui sera mauvais, ce ne sera pas elle, mais l'abus qu'on en fera. C'est donc en vain que l'Apôtre a dit de la concupiscence de la chair, qu'elle ne vient pas du Père; car vous affirmez qu'elle est bonne, et par conséquent qu'elle vient du Père, même lorsqu'on en fait un mauvais usage. Vous ne pourrez fias dire qu'elle vient du Père, quand elle est modérée, et qu'elle n'en vient pas lorsqu'elle est immodérée ; car selon vous elle est toujours bonne en elle-même, quoiqu'on en fasse un mauvais usage. Pour vous soustraire à ces cruelles angoisses, il vous suffit de croire, non pas à votre langue, mais au combat que vous soutenez. En effet, ce qui vient du Père, c'est la continence, car si elle ne venait pas du Père, elle cesserait d'être le remède à la concupiscence. Concluez que ce n'est pas du Père que vient cette concupiscence contre laquelle vous combattez, si vous vivez dans la continence. Combattriez-vous contre elle, si elle ne combattait pas contre vous ? et si elle venait du Père, elle ne combattrait pas,contre vous, quand vous ne faites qu'user de ce qui est donné et aimé par le Père.
I Jean, II, 16. ↩
