6.
Il ne nous reste donc qu'à condamner sans hésitation et avec une piété sincère, tout ce que les Priscillianistes, dans leur fausse et criminelle hérésie, pensent de Dieu, de l'âme, du corps et d'autres sujets, et à admettre en commun avec eux (ce qu'à Dieu ne plaise !) qu'il est permis de mentir pour cacher la vérité? Or, ce serait là un mal si grand que, quand même le mensonge par lequel nous chercherions à les gagner et à les changer, obtiendrait un résultat complet, le profit ne compenserait pas le tort que nous nous ferions ainsi qu'à eux, en nous pervertissant pour les corriger. En effet, par ce mensonge, nous serions à demi pervertis, et eux à demi corrigés, puisque nous ne détruirions pas chez eux l'opinion erronée qu'il faut mentir pour cacher la vérité, vu que nous la leur apprendrions, la leur enseignerions, la leur ferions voir comme nécessaire, pour pouvoir parvenir à les corriger. Or nous ne corrigeons pas des hommes que nous ne guérissons pas du procédé coupable par lequel ils croient pouvoir cacher la vérité, mais nous nous détériorons nous-mêmes, en cherchant à les gagner par le même procédé; nous nous ôtons tout moyen de croire à leur conversion, nous qui leur avons menti au temps de leur perversion; nous avons à craindre qu'ils ne fassent, quand ils seront pris, ce qu'on a fait, avec eux pour les prendre, d'abord par habitude, et ensuite par ce qu'en venant à nous, ils y trouveront établi ce qu'ils pratiquaient déjà eux mêmes.
