XXXIV.
Après avoir scruté les saintes Ecritures pour y trouver quelque maxime qui vienne,à l'appui de votre barbare système de la mort volontaire, vous vous applaudissez de rencontrer dans l'Evangile les paroles suivantes : «L'esprit est prompt, mais la chair est faible1 ». Allez-vous en conclure que chacun doit se tuer parce qu'il est faible ? Pour engager à supporter avec courage les souffrances de la persécution, vous n'avez pu vous résigner plus tôt à avouer que vos faux martyrs sont du nombre de ceux dont il est écrit : « Malheur à ceux qui ont perdu la patience2», tandis qu'on ne peut aucunement leur appliquer ces paroles du Sauveur «Vous posséderez vos âmes dans votre patience3 ». Quant à ceux qui reçurent ce reproche: « L'esprit est prompt, mais la chair est faible », ils étaient accablés par un sommeil involontaire, mais il n'était nullement question pour eux de se tuer par une mort volontaire. Relisez ces passages avec attention, et voyez ce que vous pouvez y répondre. L'Apôtre ne dit-il pas : « Dieu est fidèle et il ne permettra pas que vous soyez tentés au-delà de vos forces ; mais il donnera une heureuse issue à la tentation , afin que vous puissiez persévérer4 ? » Nous est-il défendu de croire à cette vérité apostolique, et devons-nous devenir nos propres ennemis, parce que nous ne pouvons résister à nos ennemis étrangers ? Des coeurs chrétiens se révoltent contre une telle nécessité. Que la parole de l'Apôtre, ou plutôt celle de Dieu, qui ne permet pas que les siens soient éprouvés au-delà de leurs forces, et qui donne une heureuse issue à la tentation, afin que nous puissions persévérer , que cette parole soit toujours crue par les catholiques et rejetée par les Donatistes, et que les catholiques ne se fassent pas Donatistes, s'ils veulent ne pas s'exposer à ne plus croire à cette parole. Désespérer, au sein des souffrances, d'obtenir de Dieu la sagesse, et chercher pour unique et suprême consolation à se faire dévorer, non pas par les bêtes féroces, comme le dit saint Cyprien5, mais par les flammes, sans y avoir été aucunement condamné, ce n'est pas là de la réflexion, mais de la fureur; ce n'est pas de la sagesse, mais de la folie. Laissons donc les flammes comme dernière ressource à ceux qui ne peuvent pas dire en parlant du secours du Seigneur: « C'est de lui que me vient la patience6».
