35.
Jul. Si tu prétends, au contraire, que votre enseignement et le nôtre, en d'autres termes, que les préceptes de la loi et les inventions des Manichéens et des partisans de la transmission du péché par le sang, sont à la fois conformes à la justice, nous voulons bien faire taire un instant les protestations énergiques de notre raison indignée et notas t'adresserons un langage qui respire uniquement la bienveillance et la douceur. Pourquoi donc, si vous croyez que votre doctrine et la nôtre sont également bonnes, pourquoi avez-vous suscité dans l'Italie tout entière ces factions qui la divisent? pourquoi avez-vous excité des séditions dans la ville de Rome, par des distributions d'or et d'argent faites au peuple? pourquoi avez-vous, aux dépens des pauvres, engraissé, dans presque toutes les provinces de l'Afrique, des troupes de chevaux que vous destiniez à des tribuns et à des centurions, parmi lesquels se trouvait Alypse? pourquoi avez-vous corrompu, en leur offrant des héritages, de nobles dames, les puissances du siècle, et cherché par ce moyen à allumer contre nous les flammes impuissantes de la colère publique? pourquoi avez-vous troublé la paix des Eglises? pourquoi faut-il que, grâce à vous, le règne d'un prince religieux soit souillé par des persécutions impies, puisque toi-même tu es obligé de reconnaître que notre doctrine est bonne dans toutes ses parties?
Aug. La doctrine inventée par vous est aussi contraire à la vérité que les accusations portées ici par toi contre nous. Mais, dites, autant que vous le pouvez, toute sorte de mal contre nous, au mépris de la vérité; nos efforts se borneront à défendre contre vous la foi chrétienne et catholique. Et qu'avons-nous besoin de vous répondre par des injures semblables aux vôtres? Ne nous suffit-il pas de croire à l'Evangile et de nous réjouir de l'accroissement ajouté à notre récompense dans les cieux par ces injures tout à fait contraires à la vérité que nous recevons de vous[^1]?Comment, du reste, pourrions-nous croire que votre enseignement et le nôtre, par rapport au sujet discuté ici entre nous, sont également bons, puisque, suivant nous, Dieu a dit : « Je vengerai sur les enfants les péchés de leurs pères » ; et que, suivant vous, au contraire, la défense faite aux juges humains de venger sur les enfants les péchés de leurs pères, doit être regardée comme une règle aussi inviolable que la justice elle-même? Vous attaquez les paroles sorties de la bouche de Dieu, comme si nous en étions nous-mêmes les auteurs; vous les condamnez comme contraires à la vérité et à la justice ; et vous ne sentez pas que cette résistance et ces calomnies sont un outrage dirigé, non pas contre nous, mais contre Dieu ?
- Matt. V, 11, 12.
