11.
Jul. Mais revenons au sujet dont nous nous sommes écartés. Il demeurait établi que celui à qui nous reconnaissons le titre de vrai Dieu, ne saurait prononcer aucun jugement qui soit en opposition avec les règles de la justice ; et par là même, qu'il ne saurait por. ter contre qui que ce soit une sentence de condamnation pour des péchés commis par d'autres personnes : d'où il suit que l'innocence des petits enfants ne peut en aucune manière être condamnée à cause de l'iniquité de leurs parents ; car il serait injuste que la culpabilité fût transmise avec le sang.
Aug. Pourquoi donc a-t-il été dit : « Leur race était maudite dès le commencement? » Car, l'Ecriture ne parle pas ici comme au livre de Daniel : « Race de Chanaan, et non pas de Juda[^3] » ; le Prophète, en s'exprimant ainsi, fit voir à qui les vieillards étaient devenus semblables et de quels ancêtres ils étaient les enfants dégénérés : le sage, au cor. traire, employant l'expression de race man. dite, voulait désigner des hommes mauvais par nature, comme le sont tous les enfants d'Adam que la grâce a pour mission de transformer en enfants eue Dieu. Quand il dit : « Vous n'ignoriez pas que leur nation était une nation méchante, que la malice leur était naturelle et que leur esprit pervers ne pourrait jamais être changé ; car leur race était maudite dès le commencement[^1] » ; il me semble que cette accusation s'adresse à la nature de ces hommes, et non point aux actes d'imitation accomplis par eux ; or, comment la nature humaine peut-elle être l'objet d'une telle accusation, sinon en tant que cette nature a été corrompue par le péché, non pas en tant qu'elle a été créée intègre dans la personne du premier homme ? Par là même, qu'est-ce à dire : Leur race était maudite dès le commencement, sinon, dès le jour où le péché est entré dans le monde par un seul homme ? Ils ne pourraient par eux-mêmes changer leur perversité naturelle; ce changement n'était possible qu'à la toute-puissance divine ; et cependant, par un jugement aussi juste qu'impénétrable , Dieu n'opérait pas réellement ce changement. L'Apôtre savait en effet qu'il était redevable, non pas à son libre arbitre, mais à la grâce de Dieu, d'avoir été lui-même changé et tiré de cette masse de corruption, quand il disait: « Nous avons été, nous aussi, enfants de colère par nature, comme tous les autres[^2] ».
Dan. XIII, 56.
Sag. XII, 10, 11.
Ephés. II, 3.
